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Le devoir accompli

par Mahdi Boukhalfa

Les élections législatives 2017 sont derrière nous. Vainqueurs et vaincus se saluent. Mais leur impact sur notre vie est devant nous. Que nous réservent ces nouveaux députés, ces nouveaux représentants du peuple, ce nouveau Parlement ? Fera-t-il mieux ou pire que les précédents ? Autant de questions que se posent ceux qui, dans leur coin, attendent, comme toujours, le faux pas des nouveaux députés comme dans un jeu à l'échelle d'un pays. A priori, leur mission et leurs programmes, pour ces nouveaux députés, penchent vers la défense des intérêts de leurs électeurs, ceux qui leur ont donné leurs voix pour qu'ils soient élus. Donc, de ce point de vue, les futurs députés doivent renvoyer l'ascenseur à leurs électeurs et défendre auprès du gouvernement les attentes des citoyens, et faire barrage, au Parlement, aux lois antipopulaires, et expurger par exemple, de toute loi de finances, les mesures qui ne prendraient pas en compte le niveau de vie des citoyens. Cela, c'est la théorie, la pratique, eh bien, on va attendre que le nouveau Parlement soit installé pour qu'on voie de quel bois il va se chauffer. Pour l'instant, les interrogations sur ces élections continuent à meubler les discussions dans les cafés populaires comme dans les couloirs poussiéreux des administrations, et même dans les chaumières. Le sujet qui taraude tout le monde est : pourquoi la moitié des électeurs, sinon plus, n'a pas voté ? Quelle mouche a piqué ces Algériens de ne pas aller accomplir leur devoir électoral, comme le recommandaient avec insistance les ministres de la République, mais surtout les chefs de parti, du moins ceux assurés de remporter la mise ? Tous ces gens-là, depuis longtemps à l'abri du besoin, eux, leurs familles et leur progéniture installés sur une des planètes où il n'y a pas de crise de logement et d'emploi, ont ainsi appelé, sinon supplié les électeurs à être patriotes et aller voter, pour ?'le pays, la paix, la sécurité, l'avenir''. De peur d'un boycott massif, d'un dénigrement à l'échelle du pays à ces élections. Et une fois le vote achevé et les résultats connus, ces milieux ont soudain disparu de la scène. Sauf ceux qui ont été, une fois encore, grugés, qui avaient pensé que la démocratie dans notre pays est devenue adulte. Et, surtout, que tous les partis en lice, grands et petits, avaient des chances réelles de toucher le jackpot, c'est-à-dire de remporter le maximum de sièges. Et fatalement, le jour d'après, les partis d'opposition crient au scandale, au trucage, au vol de voix, au viol des urnes et, last but not least, à la mascarade. Toutes les grosses cylindrées politiques de l'opposition, qui ont joué le jeu et ainsi crédibilisé ces législatives, pensent que ces élections, comme les précédentes, ont été truquées et que le système s'est renouvelé. Même avec un taux de participation extraordinairement bas, historique. Qu'importe ! Le piège, pour autant qu'il en soit un, s'est refermé. Sur les boycotteurs, sur les abstentionnistes, sur les bulletins nuls, sur le FLN, comme sur le PT ou le FFS. La machine a broyé tout le monde, c'était inéluctable. Il faudra donc attendre cinq années pour rejouer la partie. Mais d'ici là, il y aura dans deux ans, le grand match, la présidentielle algérienne. Alors que tous les déçus de ces législatives, abstentionnistes comme fervents électeurs, partis du pouvoir et d'opposition, se préparent à présenter des présidentiables à la hauteur. Qu'ils fassent bouger les choses, même si le Parlement nouvellement élu entre dans une législature de tous les périls. Car en face, les attentes sociales sont importantes, les échéances socioéconomiques énormes, et les perspectives financières stressantes. L'état général du pays ne peut plus souffrir de retards dans la prise en charge de certaines demandes sociales, dont l'emploi, le logement, la santé et les réseaux d'infrastructures. La demande sociale est également énorme, et donc, le futur Parlement ne doit en aucun cas en faire le raccourci au risque de devenir une simple chambre d'enregistrement. Au fait, en a-t-il été autrement ?