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Le couffin des voix en période électorale

par Mahdi Boukhalfa

L'achat de signatures pour remplir l'exigence de l'administration pour être candidat aux prochaines élections est un sport national que personne ne voit. Sauf la HIISE, qui a parlé de ?'deux ou trois cas'' seulement, quand des partis politiques dénoncent un fait établi depuis longtemps dans la galaxie des élections en Algérie. La guerre est ouverte depuis quelques semaines pour beaucoup de partis pour avoir le nombre voulu de signatures, et, surtout, pour être en pole position lors du coup de starter. Les partis politiques sont interpellés sur la crédibilité de ces élections, tout comme l'administration, qui doit rester neutre, et donner cette image tant espérée par les candidats des partis dits ?'marginaux'' de n'être pas au service des partis influents, ceux proches du gouvernement. A moins de deux mois de ces élections législatives, qui ont enregistré il y a quelques jours leur première victime, un militant FLN terrassé par une crise cardiaque à Tiaret, on vient à parler de collecte de signatures, d'achat de voix, de fraude, alors que dans le pays, cette échéance politique est à des années lumière des préoccupations des Algériens. Mais toute la question n'est plus de savoir si les Algériens iront ?'en masse'' voter, comme le proclament les médias publics, mais de savoir quels sont leur état d'esprit, leurs convictions, leurs sentiments vis-à-vis de ces législatives. Que pense un Algérien, qui va au marché tous les jours comme s'il allait à l'abattoir, vis-à-vis de ces élections lorsqu'il constate que ce sont toujours les mêmes qui sont têtes de liste, qui sont à la tête des partis, qui sont députés, ministres, responsables, sans problèmes, et qui veulent y être, cette fois encore, des ripailles politiques dans une Algérie qui n'arrive pas à sortir des sentiers battus qu'elle s'est malgré elle tracés ? Les élections législatives de mai 2017 risquent de passer inaperçues, sans intérêt pour l'Algérien qui fait ses courses en utilisant la calculette de ses enfants. Car, pour l'Algérien, l'échéance de mai prochain est moins importante que les perspectives sociales et économiques qu'il redoute pour des lendemains inquiétants. Au marché, il n'arrive plus à acheter ce qu'il veut, au marché de voitures, plus aucun espoir de décrocher une bonne ?'occase'', au café du coin, la situation économique et politique du pays est plus noire que dans les bureaux du FMI ou de la Banque mondiale, la sinistrose est partout. Les enfants ne travaillent pas, sinon ont des contrats à durée limitée, les charges locatives sont en hausse, la banane et la tomate aussi, et l'électricité et l'eau seront encore plus chères demain. Alors, faut-il encore épiloguer sur le contexte socioéconomique qui va présider à ces élections ? Inutile, n'est-ce pas ? Et quand on vient à parler officiellement d'achat de signatures, de rixes et autres bousculades autour de la confection des têtes de liste de certains partis proches du pouvoir, il n'y a plus rien à espérer pour que le couffin de la ménagère soit mieux rempli, mieux garni, au moindre coût. La banane ne sera que plus chère, le coût de la vie également, tant que ces pratiques maffieuses, délictueuses, auront pignon sur rue pour la collecte des signatures des candidats. Car, avoir accès aujourd'hui à un siège au Parlement n'a plus le sens qu'il avait il y a quelques dizaines d'années. Certes, tout n'est pas noir, mais comment expliquer à un retraité, un votant potentiel, d'aller accomplir son devoir électoral quand il n'arrive pas à sécuriser sa vie de tous les jours ? Qu'il n'a plus confiance dans les institutions de la République ?