Alger
aurait connu une journée très agitée lundi, des affronte ments
entre jeunes et des forces de l'ordre auraient été enregistrés dans plusieurs
quartiers. Ils ont même ?'brûlé'' Bab El Oued et
provoqué des émeutes à Aïn Benian,
Raïs Hamidou... La journée de lundi a été en fait
riche en émeutes et autres affrontements sur? les réseaux sociaux, qui ont
colporté, à qui mieux mieux, des informations tout à fait imaginaires. Le
comble aura été ces deux jeunes d'un quartier de la côte ?'est'' d'Alger, qui
devisaient sur les affrontements qui se déroulaient en même temps à quelques
centaines de mètres d'eux. C'est dire l'hystérie qui avait envahi les réseaux
sociaux, peut-être dans la foulée des événements de Béjaïa.
La rumeur en Algérie a en fait la peau dure. Déjà, au temps du ?'téléphone
arabe'', elle avait de solides appuis et des relais efficaces. La preuve ? Les
services du 2e bureau, lors de la guerre de Libération, ont été vaincus et
leurs relais démasqués grâce à notre infaillible et professionnel réseau de
téléphonie mobile, déjà opérationnel dans les années 1950. Avec la force de
frappe de notre ?'téléphone arabe'', les Algériens avaient démonté bien des
traquenards, bien des coups tordus de l'armée coloniale, des généraux français.
Peut-on vaincre pour autant la rumeur, celle qui fait mal et qui n'est pas
innocente ? Oui. Comment ? Tout simplement en évitant d'écouter, de colporter
et d'accorder du crédit à des informations dangereuses, déstabilisatrices.
A-t-on besoin de rumeurs pour vaincre les taxes et la hausse de la TVA ? Et
même, tiens, la hausse annoncée des tickets d'entrée des salles de cinéma ?'Mon
Ciné'' ou ?'Marignan'' de Bab El Oued pour le
prochain film de Johnny Wesmuller, ?'Tarzan au pays
des pastèques'', ou celui de ?'Ali Baba et les 40 voleurs'' au cinéma Plaza?
Bien évidemment non. Alors, la pomme de terre continuera à être vendue aussi
chère qu'enflent les rumeurs sur les marchés de gros, et que la semoule sera
toujours soutenue par l'Etat tant que le pétrole restera à des niveaux
acceptables. Et puis, pourquoi ce remue-ménage à ce moment précis, alors que la
ménagère échafaude de grandes stratégies familiales pour passer sans encombres
l'écueil de l'année 2017, en attendant des temps sociaux plus cléments avec le
retour à l'embellie des prix de pétrole. A-t-on besoin d'une rumeur ou
d'affrontements imagés avec un bon scénario monté sur des rumeurs, pour que les
taxes introduites par la loi de finances 2017 soient retirées?
Non bien sûr, à moins que l'on veuille jouer à des jeux éculés, dépassés, comme
la ?'théorie des dominos'' sur des salles de cinéma en 5D. Car l'enjeu du
moment pour tous, c'est surtout de se serrer la ceinture, de bosser encore plus
et faire en sorte que l'année qui commence soit moins stressante. Et puis, les
Algériens, fatalistes jusqu'aux ongles, ne sont pas dénués d'optimisme, et
savent d'où vient le vent et, surtout, aiment jouer aux jeux d'enfants. Jusqu'à
un certain point... au-delà, ils préfèrent éviter les solutions aléatoires.
Même si colporter une mauvaise blague et une fausse rumeur est devenu à la mode
devant le vide culturel sidéral dans lequel sont plongés depuis une éternité
les Algériens. Alors, quelle importance accorder aux mauvaises blagues
colportées des cafés algérois jusqu'à Tamanrasset ? Aucune, bien sûr.