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«Olighachie»

par El Yazid Dib

Oligarchie. Insignifiant mais lourd de sens et de faits. Un fait palpable, non reconnu peut-être, mais il est là, envahissant, dans nos ports, nos chantiers et nos routes. « Le sens de l'effort et du travail a reculé », venait de reconnaître un Ouyahia redevenu plus employeur que patron. Qui est responsable de ce recul ? Froissant une histoire de toute une économie publique et sans rougir, il clamait son « vive l'oligarchie algérienne ! » Autrement dit, son parti et une partie des prérogatives qu'il exerce au sein du pouvoir sont pour cette nouvelle forme de gouvernance où la domination d'un groupe dispose de tout jugement d'avenir. Les plus huppés dans la fortune et la politique trouveront ainsi au postérieur des comptoirs bancaires toute la latitude de la générosité, de l'entretien gratuit, de la garantie du service après-vente.

Combien de personnes, de cœurs et d'esprits n'ont-ils pas eu à connaître les affres douloureuses d'une remise en cause totale d'actes accomplis à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions ou de la réalisation de leurs passions fonctionnelles ? La situation qui sévissait dans le monopole de l'Etat dans ces années de socialisme spécifique faisait jaser plus d'un sur la faillite de la société nationale ou de l'entreprise publique. Les lois sociales des mêmes années étaient perçues généralement comme une panacée à la régression économique qui menaçaient, disait-on, tant l'avenir du pays. Et c'est ainsi qu'une nouvelle race de quêteurs de fonds par un esprit mercantile goinfre et irrésistible, se voyaient devenir des maîtres incontestés de la nouvelle configuration du marché tant national que des bribes que leur offrait un monopole abattu à bout portant. L'investissement privé à l'époque a failli, à la limite, être qualifié de kofr, l'importation d'atteinte au fondement de l'économie nationale. La simple idée de réfléchir sur un projet mettant en valeur une si petite unité de production pouvait s'assimiler à une grave entorse au principe de la propriété non exploitante. Petit à petit, tout s'est englouti avec la restructuration, dans ses abîmes desquels l'on ne voit plus la croissance ou l'embellie financière générale. D'où le recul de l'effort et du travail. La classe sociale restreinte et privilégiée nouvellement mise en route tend par ses « relais » partisans à se mettre dans le cœur du pays. Changer un monopole par un autre et en toute facilité n'est qu'une duperie d'une ouverture mal entamée. C'est à l'effort seul et scellé au travail acharné que doit revenir toute place de privilège. L'Etat n'a pas à créer des groupes plus qu'il ne doit mettre sa tête dans le maintien de ce que le peuple a créé.

L'on ne se soucie point de penser que chaque force économique dissimule à travers l'octroi de crédits une force politique et vice-versa. Le mythe de qui donne à qui d'entre l'argent et le pouvoir n'est plus à démontrer. Lorsqu'un ex-chef de gouvernement ne se trouve pas empêché de convoquer sa récente histoire, ses écoles et ses origines; l'on se dit que l'amnésie rend aveugle le plus perspicace. En 62, l'oligarchie avait un qualificatif. En 2015, on lui lance de bravos. Eu égard aux disparités qui loin de le désunir, élargissant tout de même son incohérence idéologique, Ouyahia semble réagir par mandat. Un rassemblement national est une noble idée et non pas une succursale d'un forum d'entreprises. Alors oligarchie ou pas, le sou est déjà pris.