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Si Affif, le député agitateur, dans le rôle de «Comment j'ai
mangé mon Père» alias Belkhadem. Cela aurait été une bonne chronique mais le
feuilleton FLN est devenu lassant avec force de mastication. De quoi faut-il
parler donc ? Peut-être de ce fait divers étonnant: des Algériens ont protesté,
par centaines, devant une daïra de Boumerdès, dans l'Algérois, pour demander le
départ du chef de la zaouïa des Issers. C'est la première fois. Cela se passe
pour un maire, un imam, un chef de daïra mais jamais pour un général, un
président et encore moins un chef de zouïa. Pourtant les zaouïas sont partout,
elles sont nourries avec l'argent du peuple, n'ont pas de bilan comptable ni de
registre de dépenses et de factures, ne sont pas élues, désignent qui elles
veulent, ordonnent et font du trafic d'influence avec deux amulettes et trois
téléphones portables. Pourtant les Algériens n'ont jamais demandé le départ
d'un chef de zaouïa. Du coup, pour le cas des Issers, il faut saluer. Un tabou
est peut-être brisé: celui qui donne aux chefs de zaouïa la vraie immunité
diplomatique et le statut de zone offshore et de lobby interdite à la
surveillance publique. On sait tous que lorsque les révolutionnaires vieillissent,
ils s'éloignent des kasmas et se rapprochent des zaouïas. Là, ils viennent
demander la bénédiction, donner notre argent, obtenir le soutien à une
élection. Etrange reculade de l'histoire algérienne; plus le régime vieillit,
plus il se comporte comme les colons qu'il a chassés: il chasse les Algériens
d'Alger, recourt au délit de faciès, traficote les élections, nomme les caïds,
donne des terres selon les alliances, entame des plans de Constantine, lance
des «je vous ai compris !» puis se penche vers les zaouïas pour en faire des
alliées.
Peut-être qu'à la longue on va remonter de la république vers les Almowahidoune, ce vieux royaume du Maghreb. Reculer de Babès à Ibn Khaldoun. Restaurer la dignité des harragas dans l'épopée de Tarik ibn Ziyad. Pour les moments, les zaouïas sont là. Chaque ministre en a une de favorite qu'il visite en toute discrétion après les sorties de travail. Certains ministres obligent même leurs directions de wilaya à fournir nourriture et logistique aux zaouïas qui les protègent, de sources sûres. Certaines zaouïas ont remplacé les wilayas historiques et d'autres décident des listes pour les partis. C'est donc le grand retour des sectes. Et donc, quand on lit que des Algériens ont protesté contre un cheikh de zaouïa, il faut suivre: c'est une affaire nationale qui va décider du poids politique de beaucoup. Le ministre des Affaires religieuses va-t-il répondre ? Le cheikh va-t-il être soumis à enquête ? Le citoyen est-il plus puissant que le croyant ? La police judiciaire osera-t-elle ? C'est important. Vital. Un nœud illustrant le jeu des puissances politiques en Algérie et leur redistribution. Le cheikh n'est ni élu, ni cadre supérieur de l'Etat, ni député, ni consul, ni ministre, ni militaire. D'où lui vient donc la puissance politique ? De la faiblesse de l'Etat devenu un baisemain. C'est affligeant de voir des ministres et des puissants de ce qui reste de la République venir se déchausser devant des cheikhs PDG de la bénédiction et grands détourneurs du sens. C'est heureux de voir des Algériens braver les papes discrets de l'Algérie. |
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