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Relation ombrageuse

par Abdelkrim Zerzouri

La genèse de l'histoire du registre de commerce électronique, qui remonte à six ans, personnifie la relation ombrageuse des Algériens avec la digitalisation des procédés de gestion des documents administratifs.

Depuis 2014, date du lancement des premiers échantillons des registres de commerce électroniques, l'opération traîne encore, avec un taux de 43% de commerçants titulaires d'un extrait de registre de commerce électronique, selon des statistiques établies en 2018, et on n'a pas encore fini, de nos jours, avec les actions visant la sensibilisation des commerçants quant à l'importance de s'inscrire au registre de commerce électronique avant la fin du énième délai fixé dans ce cadre, à la fin de l'année en cours, au risque d'en être radié. Claironné comme une réalité palpable par les responsables qui se sont succédé à la tête du département du Commerce, le dossier encore inachevé est hérité par l'actuel ministre du Commerce, Kamel Rezig, qui se retrouve à refaire les mêmes remarques, ressassées comme une leçon de morale, auprès de la commission ministérielle en charge de la réforme du registre de commerce, en soulignant que la numérisation de ce document contribuera à «l'élimination des registres de commerce fictifs ou faux», et permettra «le développement des activités commerciales et la transparence des transactions commerciales». Peut-on croire qu'on aurait fini une bonne fois pour toute, d'ici la fin de l'année en cours, avec cette histoire, ou ira-t-on vers un nouveau report du délai de la mise en conformité des extraits du registre de commerce pour l'insertion du code électronique, fixé pour le plus récent délai au 30 juin 2020, puis repoussé au 31 décembre 2020 ? Connaître la réponse à cette question, c'est mesurer la volonté du nouveau gouvernement de combattre l'économie informelle et la fraude. Car, le registre de commerce électronique constitue un outil de la modernisation du contrôle économique, le suivi et la régulation du marché, la transparence et l'efficience des opérations de contrôle. Reste également à connaître, au-delà des forfaitures compréhensibles des fraudeurs, les véritables raisons qui poussent à la réticence des milliers d'opérateurs économiques face à ce changement, somme toute d'une banalité extrême dans la pratique. Quelles sont les causes de ces pas lourds qui retiennent les concernés et les empêchent de se rendre au niveau des antennes du CNRC pour exécuter cette formalité si simple dans sa conception ? La bureaucratie pourrait figurer en bonne place de ces causes. Et M. Kamel Rezig, qui a insisté, lors d'une réunion ministérielle au mois de mai dernier, sur «la nécessité de faciliter toutes les démarches administratives» au profit des commerçants, dans la conversion des dossiers commerciaux en électroniques et la régularisation du commerce informel, devrait avoir une idée claire sur ce point. Aussi, les opérateurs économiques qui doivent montrer patte blanche en matière de règlement des charges sociales et fiscales avant de changer le registre de commerce et obtenir le code électronique, et qui ne sont pas à jour sur ce plan, rebuteraient ce rendez-vous par contrainte.

En tout cas, à partir du 02 janvier 2021, les administrations et les établissements publics ne peuvent accepter, dans leurs transactions commerciales, que les extraits du registre du commerce délivrés sous format électronique, selon un communiqué du CNRC. Bonjour les radiations des registres de commerce par milliers, dont les détenteurs iront grossir les rangs du commerce informel ? Ou trouvera-t-on un mécanisme souple qui permettrait aux opérateurs économiques d'obtenir ce fameux code électronique sans avoir à slalomer entre différentes administrations et surfer sur Internet pour télécharger des documents afin de constituer un nouveau dossier, alors que les documents de base se trouvent entre les mains du CNRC ?