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Citoyen 2.0

par Moncef Wafi

Footing pour l'honneur, campagne de boycott réussie, volontariat, le mouvement citoyen s'organise en prenant appui sur les réseaux sociaux et rompt avec les schémas traditionnels de la mobilisation. Exit les partis politiques, les organisations satellitaires et les rabatteurs de foules, la nouvelle tendance en vogue est de lancer l'initiative citoyenne et la laisser porter par les «partager» pour impliquer le maximum de personnes. Et l'idée a fait son bonhomme de chemin puisque les actions à caractère civique se multiplient et touchent une large frange de la population sans distinction de sexe ou d'âge. Cette orientation dans le combat citoyen a fini par reléguer au second plan les poussiéreux partis politiques et leurs relais populistes, actant de fait une obsolescence partisane qui a condamné depuis longtemps ces sigles creux.

Qu'elles soient de la majorité ou de l'opposition, ces formations politiques ont perdu tout crédit auprès des Algériens qui ne croient plus aux discours sans relief des politicards de tout bord. Les expériences des différents parlements qui ont fait plus de mal qu'autre chose à leurs supposés électeurs sont là pour rappeler l'amère pilule qui ne veut plus passer. Les derniers scrutins ont confirmé cette désaffection et ce désamour consommés entre les partis politiques classiques et leurs bases militantes. L'incapacité de ces mêmes appareils à se renouveler et à épouser les aspirations du moment a coupé les derniers ponts avec leur grenier électoral.

L'absence même de réaction des politiques vis-à-vis d'un sujet aussi grave que l'agression d'une joggeuse, à quelques encablures de la rupture du jeûne, est symptomatique de ce fossé qui s'est creusé entre des directions ankylosées et une société en perpétuelle mutation.

Malgré les tentatives de s'inspirer des réseaux sociaux, lors des dernières législatives, on est encore loin d'une adoption absolue de la Toile en dehors des sentiers battus. Et comme la nature a horreur du vide, ce manque de réactivité a été vite remplacé par un volontarisme citoyen, pas toujours le bienvenu. L'émergence puis la démocratisation des réseaux sociaux sont telles qu'il est impossible, aujourd'hui, de composer avec les événements en essayant d'éluder ces nouveaux vecteurs de l'information. Bien que l'Algérie reste parmi les cancres dans le débit Internet, les citoyens ont adoubé cet espace virtuel pour militer pour les causes qu'ils estiment défendables. Malheureusement, cette liberté d'expression trouve son pendant dans l'invective, la diffamation ou encore la déformation qui accompagnent toute initiative citoyenne.