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Punition collective

par Moncef Wafi

La ministre de la Poste, des TIC et du Numérique a annoncé, mercredi dernier depuis Mila, que «l'internet sera coupé pendant une heure au début de chaque épreuve du baccalauréat». Le but de cette interruption momentanée dans les réseaux sociaux c'est «pour éviter tout ce qui peut entacher cet examen», explique, en substance, Houda-Imane Faraoun. Depuis trois ans que ça dure, trois ans que les fuites des sujets du baccalauréat sont systématisées, on n'arrive toujours pas à trouver une parade à ce problème. La solution de facilité, spécialité algérienne devant l'Eternel, étant toute trouvée, il suffit juste de couper l'accès aux réseaux sociaux, une heure de temps avant chaque épreuve, cinq jours durant, sinon plus si d'aventure on assistait au remake de 2016 et 2017 et leurs deux sessions. Tout en passant sous silence les conséquences d'une telle action et sans dégoiser sur ses raisons, le gouvernement envoie un message fort aux Algériens en indiquant qu'un retour à l'âge de pierre est possible à tout moment. Que la coupure d'Internet peut être la solution aux problèmes du système à n'importe quel moment. C'est aussi l'occasion de rappeler que le monde virtuel de la Toile est mis sous tutelle avec les nombreuses initiatives tendant à le surveiller sous différents couverts. La promulgation d'un organe de surveillance de l'internet, critiquée par les internautes algériens qui y ont vu une sorte de mirador braqué sur la Toile malgré les assurances du gouvernement sur la préservation de la vie privée ; la proposition de la ministre de la Poste, des TIC et du Numérique de bloquer les sites pornographiques et ceux qui font la promotion de la violence et du racisme ; les demandes algériennes d'informations sur les utilisateurs de Google, suggèrent elles aussi qu'un mur a été construit autour de la Toile pour en surveiller et surtout limiter son accès. Les coupures générales d'Internet lors des derniers bacs sont dans toutes les mémoires et pour les plus sceptiques, on se dirige vers une législation à la chinoise concernant le monde de Ia Toile. Cette mesure témoigne du peu de sérieux dont sont gérées ce genre de situations et renvoie à l'incapacité chronique du gouvernement à prendre des mesures drastiques pour empêcher que les fuites organisées ou fortuites n'aient lieu. Si on avait frappé d'une main de fer les responsables de ces fuites, en ne se contentant pas simplement d'impliquer les seuls lampistes, on aurait pu marquer les esprits, mais voilà c'est l'Algérie où la punition collective prime sur la justice individuelle. Où la loi s'efface devant l'incapacité des responsables à solutionner les problèmes.