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Plus de visa Schengen pour les Américains !

par Moncef Wafi

Guerre commerciale, protectionnisme outrancier, Bruxelles évoque «un pur protectionnisme». La décision de Trump d'imposer dès ce vendredi des taxes douanières de 25% sur les importations d'acier et de 10% sur celles d'aluminium en provenance de l'UE, du Mexique et du Canada a fait vivement réagir les partenaires commerciaux de Washington qui menacent, à leur tour, de ripostes appropriées et de défense des marchés intérieurs.

Si l'Europe panique face à cette décision, elle y subodore des relents politiques nauséabonds, conséquences de l'accord sur le nucléaire iranien, dénoncé, rappelons-le, par l'administration Trump pour obliger les pays membres de l'UE à y souscrire. Une forme de chantage grossier, si cela se trouve, mais qui sonne comme un retour de manivelle à la gueule de Bruxelles.

En effet, il n'y a pas si longtemps, l'Algérie s'est retrouvée à la même place que ces pays européens, pas dans la configuration actuelle des choses, mais à y regarder de plus près, dans les mêmes circonstances, pourrait-on dire. En effet, les mesures prises par l'Algérie pour protéger son économie «pour réduire ses importations face aux difficultés financières particulièrement au niveau de la balance commerciale et celle des paiements» ont été accueillies avec un «durcissement» des conditions d'obtention des visas Schengen particulièrement de la part des Français et des Espagnols. Chantage quand tu nous tiens ! Pourtant, cette notion de protectionnisme commercial n'est pas nouvelle puisque au G20 de Hambourg, il y a été longuement question.

Si depuis l'avènement de Trump et son slogan «l'Amérique d'abord», les Etats-Unis inquiètent le reste du monde, un compromis entre condamnation du protectionnisme et droit à se défendre aurait été trouvé avec Washington. Le G20, qui a fait de la lutte contre le protectionnisme une ligne de conduite, a été obligé de faire des concessions aux Américains à travers l'usage «d'instruments légitimes de défense commerciale». Toute la question était de savoir si cette ligne de défense pouvait être élargie au cas de l'Algérie ? Il semble que non, puisque Bruxelles avait épinglé notre pays sur cette question dans son rapport annuel sur les obstacles au commerce et à l'investissement. La Commission européenne reproche à l'Algérie la mise en place de deux nouvelles mesures protectionnistes en 2016 afin d'augmenter sa production locale «dans un contexte de dégradation de son compte courant et de sa balance commerciale». Bruxelles voit toujours d'un mauvais œil la mise en place du régime de licences d'importation qui a eu des conséquences directes sur nombre de secteurs d'activités aussi bien en France qu'en Espagne, impactant négativement les exportations de véhicules en provenance de l'Union européenne.

Pourtant, ce n'est pas la première fois que l'Algérie est interpellée sur cette question. De Hangzhou en Chine, où les dirigeants des 20 pays les plus puissants de la planète se sont réunis en 2016, l'Algérie avait déjà été mise en joue, enfin pas directement mais faisant partie de ces pays qui ont érigé le protectionnisme comme mode de gouvernance économique. Face à la chute drastique des recettes des hydrocarbures induite par la dégringolade des prix du baril de pétrole, l'Algérie n'avait pas trouvé d'autres solutions que de blacklister entre 1700 à 2000 produits interdits d'importation pour lutter contre l'érosion de ses réserves de changes. La décision du ministère du Commerce de suspendre toutes les importations des produits finis avait fait réagir les partenaires économiques, surtout européens. Il a fallu que Tebboune, alors ministre par intérim du Commerce, distribue les assurances pour le respect des engagements contractuels de l'Algérie, à commencer par ses accords avec l'UE.