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Panique et divagations à Rabat

par Kharroubi Habib

Paniqués par la multiplication des revers diplomatiques qu'ils ont essuyés sur le dossier du Sahara occidental mais aussi et surtout par la montée du mécontentement populaire s'exprimant par une contestation politico-sociale faisant tache d'huile dans le pays, le roi du Maroc et le Makhzen ont recours à la stratégie de la diversion consistant à faire croire au peuple marocain que dans les deux cas il y a complot tramé par l'étranger visant à s'en prendre à l'intégrité territoriale du Royaume. L'étranger c'est bien entendu l'Algérie voisine sur le dos de laquelle ils cherchent à renouer l'union patriotique vacillante autour du trône et du gouvernement.

C'est à cela que se sont échinés ce dimanche dernier le Premier ministre du Royaume et ses ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères. Le premier en tenant une réunion avec les partis politiques et les seconds en s'adressant au Parlement. A ces partis et aux parlementaires il a été demandé de resserrer les rangs derrière l'autorité royale et gouvernementale pour faire échec au prétendu complot dont l'Algérie et le Polisario en seraient les artisans. Le vent de panique qui s'est emparé de la sphère dirigeante marocaine lui a fait perdre toute retenue comme l'attestent les divagations du ministre des Affaires étrangères faites d'accusations et de menaces à l'endroit de l'Algérie.

Le prétexte aux gesticulations dont font montre le Premier ministre et son gouvernement est que le Polisario bien évidemment « manipulé » par l'Algérie tenterait de changer le statut juridique de la zone tampon instituée au Sahara occidental par l'accord de cessez-le-feu négocié sous l'égide des Nations unies. S'il y a non-respect des clauses et dispositions de l'accord de cessez-le-feu en question, il est indubitablement le fait démontré de la partie marocaine. Cet accord dispose en effet que le peuple du Sahara occidental doit être appelé à se prononcer par voie référendaire sur le statut qu'il veut pour son territoire. Depuis des décennies que l'accord de cessez-le-feu a été signé, le Maroc s'entête à refuser l'organisation d'un référendum ainsi que stipulé en son texte.

A une population marocaine qui bouillonne et casse le tabou de la sacralité du trône et du système monarchique, Mohamed VI n'a d'autre ressource pour en conserver la fidélité que détourner sa colère contre l'Algérie voisine qui n'a d'autre tort que celui de s'être rangée du côté des Sahraouis revendiquant leur droit à l'autodétermination qui leur est reconnu par le droit international et les résolutions successives des Nations unies et du Conseil de sécurité. Le Makhzen et sa propagande joue en l'occurrence sur le sentiment anti-algérien qu'ils ont distillé dans des pans de cette population avec le risque grave qu'il en résulterait un enchaînement de situations qui transformerait le conflit du Sahara occidental en une confrontation directe entre les deux pays voisins. Mais cette dangereuse fuite en avant pour laquelle le trône alaouite et le Makhzen semblent s'être préparés pourrait bien se conclure par la perte pour la monarchie et le système du Makhzen.