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Des déclarations qui ont été pain béni pour le régime iranien

par Kharroubi Habib

En réplique aux manifestations anti-régi-me qui ont secoué le pays pendant plusieurs jours, les partisans du pouvoir sont à leur tour descendus dans la rue pour faire la démonstration que ses contestataires ne représentent pas l'opinion majoritaire du peuple iranien. Leur démonstration de force oblige à reconnaître que contrairement à ce qu'en disent ses ennemis extérieurs et les médias qui partagent leur point de vue, le régime iranien dispose encore d'une large base sociale qui ne lui a pas fait défection malgré le mécontentement qu'elle manifeste à l'endroit des promesses tant économiques que sociales et politiques non tenues par les gouvernants en son nom ou lentes à se concrétiser.

Si la vague de protestation ne s'est pas amplifiée et a même reflué ce n'est pas la répression dont les manifestants anti-régime ont fait l'objet qui en est la cause. Les Iraniens s'en sont en majorité démarqués par conscience que dans le contexte auquel leur pays est confronté le trouble social qu'engendrent les démonstrations de rue anti-régime donne prétexte à l'ingérence étrangère qui elle ne cherche qu'à jeter de l'huile sur le feu dans le but de provoquer la survenue d'un scénario à la syrienne. Pour les tenants du régime, les déclarations interventionnistes et hystériquement vouées à prôner l'affrontement être Iraniens ont été pain béni car ayant conforté au sein de la majorité des citoyens la thèse de manifestations anti-régime inspirées et manipulées par les ennemis étrangers de l'Iran.

Ce n'est pas le seul effet qu'ont eu ces déclarations incendiaires qui ont joué en faveur du régime, elles ont également isolé internationalement leurs auteurs. Donald Trump et Benyamin Netanyahu qui ont proféré les plus agressives et franchement incitatives à la guerre civile entre Iraniens se sont retrouvés seuls à pousser dans ce sens. Les principaux dirigeants occidentaux qui épousent traditionnellement leur point de vue ne les ont pas imités et certains les ont même appelés à arrêter de jeter de l'huile sur le feu, conscients que s'il se crée en Iran une situation à la syrienne, il en résulterait des conséquences régionales et même mondiales qui échapperont à tout contrôle.

Il n'en demeure pas moins que la rue iranienne a fait un coup de semonce au régime en place lui enjoignant de se réformer dans le sens plus libertaire voulu par elle et de tenir ses promesses au plan économique et social. C'est la périlleuse et peu aisée feuille de route qui incombe à Rohani le président réélu et à son gouvernement, pris entre les étaux que son leurs adversaires conservateurs réfractaires aux réformes économiques et à une ouverture politico-sociétale mettant fin aux archaïsmes qui étouffent la société iranienne et la détermination de Donald Trump et de son administration à accentuer sur eux les pressions et sanctions qui ne leur laisseront aucune marge d'action dans ce sens. Pour entraîner la majorité silencieuse iranienne à lui prodiguer son soutien, le réformateur Rohani doit lui démontrer qu'il n'est pas un velléitaire comme son prédécesseur du même courant politique, Khatami pour le nommer, en forçant la frange conservatrice du régime à se plier à sa démarche et aux concessions auxquelles elle l'oblige.