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Morose campagne

par Moncef Wafi

Un peu plus d'une semaine, la campagne électorale pour les locales peine à décoller. Et c'est un doux euphémisme. Sinon comment considérer la désaffection populaire et le peu d'intérêt accordé à des candidats dont beaucoup sont incapables de développer un discours autre que populiste. Les observateurs s'accordent sur la pauvreté intellectuelle des candidats aux élections du 23 novembre alors que les affiches électorales donnent même le ton d'une campagne insipide aux relents volontairement paternalistes. Certains supports jouent carrément sur la fibre religieuse, avec pour tout programme électoral la photo d'une mosquée en toile de fond. Faut-il pour autant critiquer ces hommes, ces femmes et ces candidates invisibles qui cachent leur visage alors qu'elles sont censées être des représentantes du peuple ? La réponse est dans la question et le niveau d'exigence étant ce qu'il est, on se retrouve avec des futurs élus très limités sur toutes les questions de management.

Il est inconcevable qu'Alger parle de plus de décentralisation pour les communes, ce qui équivaut presque à les considérer comme des entités économico-administratives, appelées à s'autofinancer, en mettant à leur tête des dirigeants presque ignorants des outils de gestion. Et c'est là le défi. A l'image désastreuse des législatives de mai dernier, ces locales sont vouées à battre un autre record d'abstention tant les ingrédients d'un échec populaire sont savamment mis en place. Déjà que la confection des listes a donné, comme de coutume, à des batailles de chiffonniers, la pauvreté sinon l'absence de programmes électoraux discrédite un peu plus les partis en lice. Les salles vides, les meetings déprogrammés faute de publics, les tournées sous haute sécurité dans les quartiers, histoire de se faire voir, sont le quotidien morose de cette campagne qui s'accommode du reste de ce statut.

La mémoire collective, étant abreuvée par toutes ces histoires d'urnes truquées et ces rapports sur les fraudes électorales, a pris le parti de ne plus cautionner ces rendez-vous. Les aveux du président du Haut comité de surveillance des élections n'ont pas non plus arrangé les choses, critiquant ouvertement les décisions de l'administration d'éliminer certaines listes de la course. Même l'apport des chefs de parti ne pourra pas repêcher cette campagne du marécage où elle s'est noyée tout comme pour les législatives où ils ont eu du mal à remplir la moitié d'une salle. Ce qui reste finalement comme image pour la postérité, ce sont ces affiches kitch et ces bananes et yaourt offerts pour une voix.