Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Les vérités du Qatar

par Moncef Wafi

Les révélations de Hamad bin al-Jassem al-Thani, le fantasque ex-Premier ministre et ex-chef de la diplomatie qatarie, ont le mérite d'apporter un éclairage initié au complot international ourdi contre la Syrie. Dans un entretien accordé à la BBC, l'ancien ministre des Affaires étrangères de l'émirat reconnaît, preuves à l'appui, que son pays a été mandaté par l'Arabie Saoudite et les Etats-Unis pour s'occuper du dossier syrien. Dans les faits, le Qatar a dépensé plus de 137 milliards de dollars pour la déstabilisation de la Syrie alors que les armes fournies par son pays aux groupes terroristes étaient acheminées via la Turquie en coordination logistique avec les Etats-Unis.

Les informations apportées par Al-Jassem ne sont un secret pour personne tant la thèse du complot était installée, mais le fait que ce soit lui, un ancien diplomate et homme d'Etat en fonction lors de ces événements donnent du crédit aux explications entendues çà et là. On n'a plus à faire ici aux sites conspirationnistes et ces théories souvent invérifiables et les vérités qataries ne sont certainement pas un mea-culpa innocent. Le Qatar solde les comptes avec les pays de la région qui l'ont blacklisté en balançant sur une conspiration internationale impliquant Américains, Turcs, Saoudiens, Emiratis, Marocains, Jordaniens, Israéliens, Français et Britanniques. C'est dire la dimension d'un plan visant à désintégrer un Etat quitte à le livrer aux groupes terroristes.

Si Al-Jassem n'indique pas les raisons propres de chaque pays à vouloir réduire en cendres la Syrie, il n'est pas difficile de cerner les dividendes individuels. Les Saoudiens et leurs alliés du Golfe pour réduire la présence iranienne dans la région, les Israéliens pour couper le pont entre les armes de Téhéran et le Hezbollah libanais et le reste des pays pour assurer la sécurité de l'Etat hébreu. Turcs, Jordaniens et Marocains étant la main-d'œuvre locale. Hamad bin al-Jassem révélera également que la Syrie avait échappé en 2007 à un plan apocalyptique visant sa désintégration.

Il a aussi levé le voile sur une véritable industrie de la trahison expliquant que pour encourager les désertions dans les rangs de l'armée syrienne, un simple trouffion recevait 15.000 dollars et le double pour un officier. Il dira que certains, les chefs de guerre ont profité de l'argent qatari pour devenir milliardaires. Il n'hésitera pas non plus à citer le cas de l'ex-Premier ministre syrien, Riyad Hidjab, qui a fait défection contre 50 millions de dollars offerts par Ryad. Concernant l'Algérie, celui qui avait menacé notre pays par son retentissant «Votre tour viendra», affirme que c'est encore le Qatar qui finance la chaîne de l'ex-FIS Al-Magharibia, chargée de ternir l'image de l'Algérie.

A travers ce déballage médiatique-règlement de compte, l'ex-Premier ministre tait certainement d'autres secrets d'Etat en attendant le courage intéressé d'un autre repenti.