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La double sanction

par Kharroubi Habib

Le taux de participation électorale au scrutin des législatives de jeudi officiellement annoncé par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales a confirmé que malgré la campagne menée tant par les autorités que par les partis engagés dans la compétition électorale en faveur d'un vote populaire massif, l'abstention loin de reculer a encore progressé comparativement à celle enregistrée lors des élections législatives de 2012. S'il confirme bien cette tendance que les pouvoirs publics et les acteurs politiques s'étant impliqués dans le processus électoral ont vainement tenté d'inverser, le taux de participation de 38,29% officiellement proclamé ne reflète indubitablement pas la vérité qui est qu'il est contredit par la désertion sans précédent qu'ont connue les bureaux de vote à travers pratiquement l'ensemble du territoire.

Situation dont l'ampleur a contraint les autorités à se résoudre en dernière extrémité à repousser l'heure de fermeture de ces bureaux de vote mais sans que cela produise le sursaut participationniste qu'elles ont espéré. Du moment que l'enjeu du scrutin a été tant pour le pouvoir que les forces politiques y ont pris part celui de la participation, il ne fait aucun doute que les deux ont essuyé un désaveu cinglant dont nul argument qu'ils peuvent avancer n'en atténuera la portée discréditante. Dans son immense majorité l'électorat leur a tourné le dos en amplifiant l'abstention mais aussi en faisant que les votes exprimés recèlent un taux de nullité qui a encore singulièrement réduit le socle électoral de l'Assemblée populaire nationale (APN) issue du scrutin.

Dans ces conditions, la recomposition du champ politique dessinée par la participation électorale étriquée enregistrée lors du scrutin ne reflète nullement la réalité politique qui prévaut dans le pays, laquelle est que dans leur imposante majorité désormais franchement avérée les Algériens ne se reconnaissent ni dans le pouvoir place ni dans les forces d'opposition ayant sollicité leurs voix. En actant de la sorte leurs positions, ils ont clairement signifié qu'ils sont en rupture irrémédiable avec le système politique dont le premier a tenté de légitimer la pérennité en les incitant à une participation électorale massive et avec une opposition qui tout en s'affichant en adversaire résolue de cette solution s'est fait l'alibi « démocratique » de sa tentative en acceptant de jouer le jeu d'une compétition électorale qu'elle savait par avance perdue pour elle.

L'absurdité du comportement de cette opposition lui vaut d'avoir tenu le rôle de faire-valoir que les électeurs ont autant sanctionné qu'ils ont marqué leur rejet de la fiction miroitée par le pouvoir d'un prétendu changement politique opéré par les « réformes » qu'il a initiées. Elle peut toujours crier que ce pouvoir n'a pas respecté ses engagements en la matière, ce qui est cause de la désaffection électorale qu'a connue le scrutin, elle sera tout autant inaudible au sein de l'opinion publique car désormais perçue par elle comme au mieux étant d'une naïveté politique indécrottable et au pire une opposition aux convictions et principes gangrenés par l'opportunisme que lui dictent des intérêts de courte vue.