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L'embrasement en Libye

par Kharroubi Habib

En Libye dans le croissant pétrolier, poumon économique du pays, d'intenses affrontements ont opposé les forces loyales au maréchal Haftar aux combattants de la brigade de défense de Benghazi (BDB) réputée d'obédience islamiste et se poursuivent encore, même si les premières prétendent être parvenues à rétablir leur contrôle sur cette zone dont elles ont été chassées il y a une dizaine de jours. Dans le même temps, Tripoli la capitale du pays est elle aussi théâtre de combats tout aussi violents mais opposant les forces de sécurité loyales au gouvernement d'union de Fayez al-Sarraj à des adversaires qui seraient des partisans de l'ancien Premier ministre Ghweil qui chercherait à reprendre le pouvoir.

Il en résulte une situation qui à l'évidence met à mal les efforts diplomatiques aussi bien algériens que ceux des autres pays voisins de la Libye et de l'ONU visant à ramener tous les protagonistes de la crise libyenne autour d'une table de négociations. L'embrasement éloigne en effet et sans conteste cette perspective qui avait paru se dessiner dans le sillage des médiations entreprises. Les armes parlant à nouveau entre les protagonistes de la crise libyenne manifestement déterminés à régler par cette voie leurs contentieux, l'on voit mal comment il va être possible de leur faire renouer le processus du dialogue interlibyen inclusif que ces médiations tentent de relancer. Aucun des belligérants que l'Algérie et les autres acteurs internationaux cherchent à rallier à ce processus n'a refusé catégoriquement d'y prendre part. Mais ils semblent tous être résolus à s'acquérir d'abord une position de force sur le terrain au détriment du rival potentiel et ainsi lui dicter les termes de l'éventuel accord politique auquel donnerait lieu le dialogue interlibyen. Dans le bras de fer qui oppose les belligérants libyens c'est le gouvernement d'union nationale (GNA) que préside Sarraj qui est en grande difficulté. La reconnaissance internationale dont il jouit n'est pas à même de garantir sa survie.

N'étant pas parvenu à asseoir son autorité et s'imposer à ses contestataires, il apparaît manifestement dans l'incapacité de prétendre encore se réclamer d'être le légitime détenteur de l'autorité officielle du pays. D'autant plus que la communauté internationale qui lui a accordé sa reconnaissance ne lui prodigue qu'un soutien limité et très ambigu. Surtout ambigu parce que certaines puissances qui prétendent se tenir à ses côtés accordent quasi ouvertement leur appui à ses contestataires et vont jusqu'à leur fournir une assistance militaire qui leur a permis de le mettre en échec.

Ces mêmes puissances décrient le gouvernement d'union nationale pour n'être pas parvenu à mettre sur les rails un processus de réconciliation interlibyen pour lequel il a été constitué. Mais en occultant qu'elles ont subordonné sa mise en place à des exclusions qui ont rendu impossibles pour lui certains ralliements sans lesquels il ne pouvait apparaître représentatif de toutes les forces parties prenantes de la crise libyenne. Il a certes failli au but pour lequel l'a destiné la reconnaissance de la communauté internationale. Mais la grande et véritable faillite dans la crise libyenne est celle de cette communauté internationale qui s'est laissée entraîner dans une intervention militaire dont le seul objectif a consisté à faire tomber Mouamar Kadhafi et son régime sans se préoccuper de ce qui pouvait advenir pour la Libye dans le sillage de cette opération.