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Le prince des reniements

par Kharroubi Habib

Le 26 février dernier, 154 parlementaires français de gauche comme de droite ont adressé une lettre ouverte au président Hollande lui rappelant son engagement électoral de la reconnaissance de l'Etat palestinien par la France et lui demander alors qu'il s'apprête à quitter ses fonctions de se montrer « à la hauteur de l'enjeu et de ne pas manquer ce rendez-vous avec l'histoire » en tenant sa promesse à l'égard des Palestiniens. Nous avions dit le plus grand bien sur leur initiative mais sans cacher qu'elle n'aboutira pas car François Hollande n'a pas le courage politique pour prendre la décision de reconnaître l'Etat palestinien. Nous n'avons pas été démentis puisqu'il a répondu par le refus à la demande des parlementaires.

Les arguments qu'il a développés pour justifier son refus sont un galimatias de considérations qui évacue la véritable raison qui est qu'il ne croit aucunement en la création d'un Etat palestinien et que tout au long de son mandat il n'a fait que semblant d'œuvrer à la concrétisation de cette perspective. Il a électoralement soutenu le projet de reconnaissance de l'Etat palestinien pour s'assurer le vote des nombreux électeurs français qui y sont favorables. Il l'a utilisé comme carte politique auprès des Palestiniens pour les contraindre à la patience et à adopter une ligne diplomatique moins offensive à l'encontre de l'Etat sioniste.

Il y a réussi puisque Mahmoud Abbas et l'Autorité palestinienne s'accrochant à sa « promesse » l'on suivi dans toutes les diversions dont la France a usé pour casser le front international qui s'étoffait et a été en passe d'imposer universellement la reconnaissance de l'Etat palestinien comme seule initiative à même de contrer la politique annexionniste et colonialiste de l'Etat sioniste.

Si François Mitterrand son prédécesseur socialiste à l'Elysée a mérité d'être appelé le « prince de l'ambiguïté », Hollande entrera lui dans l'histoire avec celui de « prince du reniement ». Il a tout renié en effet: les convictions qu'il prétend avoir, les familles politiques qui l'ont porté au pouvoir en France et les causes internationales qu'il déclare soutenir. L'erreur historique des dirigeants palestiniens a été dans leur naïveté de croire que Hollande est doté du courage politique de s'en prendre à l'Etat sioniste dont l'attitude constante à l'égard de la France est de la déprécier en tant que puissance cherchant à jouer un rôle actif dans la politique au Proche-Orient.

Le courage politique de défier cet Etat et les lobbys qui le défendent n'a jamais effleuré la pensée du chef de l'Etat français en fin de mandat. Les effets d'annonce sur le conflit israélo-palestinien dont le mandat de Hollande a été ponctué n'ont été que cela. Ils ont endormi la vigilance des dirigeants de l'Autorité palestinienne sans aucunement effaroucher ceux de l'Etat sioniste et des lobbys qui travaillent pour lui car eux ayant pris la juste mesure de la fausseté des intentions qu'ils annonçaient.

En guise d'excuse suprême pour son refus de sauter le pas comme le lui ont demandé les 154 parlementaires, mais aussi et avant eux l'ensemble du Parlement français, François Hollande a osé soutenir que sa position est en défense de l'intérêt de la cause palestinienne à laquelle une reconnaissance par la France de l'Etat palestinien susciterait des obstacles plus infranchissables encore que ceux auxquels elle est déjà confrontée. Comprenne qui voudra l'homme des reniements.