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Un retour à l'UA sérieusement compromis

par Kharroubi Habib

En septembre dernier, le roi du Maroc a adressé à l'Union africaine (UA) un message l'informant de l'intention son pays d'effectuer son retour en son sein qu'il a quitté dans les années 80 en protestation contre l'octroi du statut d'Etat membre à part entière de l'organisation à la République arabe sahraouie démocratique (RASD).

La demande marocaine va être débattue au cours des travaux du sommet de l'UA qui vont s'ouvrir aujourd'hui à Kigali, la capitale du Rwanda. Le retour du Maroc dans le giron de l'organisation n'aurait pas posé problème si son souverain n'avait pas émis son souhait en l'accompagnant de considérations sous-entendant qu'il est conditionné par le retrait à la RASD de son statut de membre. Une présentation que la propagande du Royaume présente comme ayant obtenu l'acquiescement d'une majorité d'Etats membres de l'organisation. Ce qui est une pure contre-vérité car ceux qui l'ont énoncé taisent que la plupart de ces pays sont certes favorables au retour du Maroc dans l'organisation mais nullement décidés à en admettre l'exigence à l'encontre de la RASD. L'intox à laquelle s'est adonnée sa propagande risque d'occasionner une sérieuse déconvenue au Maroc, tant elle est apparue à certains Etats donnés par elle ayant souscrit à son exigence comme ayant visé à leur forcer la main.

Depuis que le souverain marocain a adressé son message à l'Union africaine, l'on a assisté à une frénétique offensive diplomatique marocaine qui a visé à faire prévaloir la position du Royaume sur la question du Sahara occidental et s'assurer ainsi que sa demande de retour soit acceptée avec l'exigence qu'elle comporte. Des signaux ont été émis tant en Afrique qu'internationalement alors que l'offensive diplomatique marocaine battait son plein qui ont dû singulièrement doucher l'espoir de sa réussite qu'ont dû cultiver les autorités du Royaume.

Il y a eu celui venant de l'Union africaine elle-même qui lors du sommet afro-arabe a réitéré son soutien quasi unanime à la RASD dont le Maroc a contesté la présence à ses assises. Il a été suivi par celui de la Cour de justice européenne qui a rendu un arrêt dans lequel il a été stipulé que le Sahara occidental est un territoire au statut distinct et séparé reconnu par l'ONU, ce qui est un rejet clair de la thèse de sa prétendue « marocanité » soutenue par les autorités de Rabat. Il y a quelques jours enfin le secrétariat d'Etat américain a lui aussi accablé ces autorités marocaines en maintenant le Sahara occidental sur la liste des territoires dont la décolonisation reste à parachever.

Peut-on imaginer que l'Union africaine qui a si spectaculairement réitéré sa solidarité avec la cause incarnée par la RASD se dédie moins de trois mois après ? Un rétropédalage de sa part sur ce dossier alors que se multiplient à travers le monde les gestes et initiatives en faveur de l'autodétermination du peuple sahraoui la discréditerait totalement et ruinerait les efforts qu'elle fait pour que soient prises en considération ses positions sur les problèmes et dossiers du continent africain et respectées les décisions prises par elle à leur sujet. Sans compter qu'il portera un coup irrémédiable à son unité et cohésion.