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L'axe Tel-Aviv - Ryadh n'est pas qu'une supposition

par Kharroubi Habib

« En Syrie, j'ai l'impression que quel que soit le cas de figure, Israël est gagnant. Si Bachar s'en va, la Syrie mettra beaucoup de temps à se stabiliser. Si Bachar reste, il sera tout de même très affaibli. Et si la guerre continue, ce sera tant mieux pour Israël... En outre, les armes chimiques étaient les seules armes stratégiques que craignent les Israéliens. Bref, à tous les coups, Israël est gagnant. Je ne suis pas sûr que les Arabes en soient conscients?»

Ce n'est pas là le point de vue formulé par un officiel du régime syrien ou par un supporter étranger de Bachar El-Assad. On le doit à l'émissaire international pour la Syrie Lakhdar Brahimi qui l'a asséné dans l'interview qu'il a accordée à l'hebdomadaire franco-tunisien «Jeune Afrique». Il va le lui être à l'évidence reproché par les Occidentaux amis d'Israël qui par leur comportement dans le conflit syrien ont contribué à créer cette situation dont toutes les issues seront favorables aux intérêts de leur protégé. Mais par les Arabes eux-mêmes dont il incrimine l'inconscience. Pas tous les Arabes cependant mais par ceux qui se sont alignés à fond sur les puissances occidentales et les monarchies de la région qui ont transformé la crise syrienne en conflit armé dévastateur pour le pays.

C'est en toute conscience que les monarchies arabes se sont attaquées à la Syrie. Qu'Israël soit le bénéficiaire du plan de déstabilisation auquel elles ont apporté leurs contributions multiformes, leur importe peu car elles ont scellé une alliance stratégique avec cet Etat qui implique la neutralisation de la Syrie coupable de s'être opposée à cette alliance. La réalité d'une communauté d'objectifs entre l'Etat sioniste et les monarchies arabes est une évidence à la clarté absolue. Là encore, la confirmation est venue d'une personnalité dont le propos ne peut être récusé en doute car s'agissant de Tsipi Livni, l'ancienne ministre israélienne des Affaires étrangères et présentement ministre de la Justice dans le cabinet Benyamin Netanyahu. Elle a convenu qu'effectivement Israël et les monarchies arabes œuvrent de concert à faire échec aux ambitions régionales de l'Iran et de ses alliés dans le monde arabe parmi lesquels se trouve évidemment en tête le régime de Damas.

L'Arabie Saoudite et les autres monarchies arabes ne cachent même plus qu'elles sont en connivence étroite avec l'Etat sioniste. La concertation et la collaboration entre eux sont désormais pratiquement officialisées. Bandar Ben Sultan, le prince saoudien de premier rang, est l'âme de ce rapprochement. Ryadh et les capitales des autres monarchies du Golfe voient dans le parapluie israélien le substitut à celui de l'Amérique dont elles se sont prises à redouter le défaut depuis que Barack Obama est arrivé à la Maison Blanche. La détente qui s'est opérée dans les relations américano-iraniennes après l'élection de Rohani et la conclusion de l'accord américano-russe pour une solution politique au conflit syrien ont véritablement affolé les princes et émirs arabes au point qu'ils ont évacué toute prévention à l'endroit de l'Etat sioniste dont ils quémandent maintenant la protection, peu leur importe ce qu'elle implique pour le monde arabe et les Palestiniens au premier chef.

L'axe israélo-saoudien n'est plus une vue de l'esprit irréalisable mais une réalité tangible dont les conséquences ne vont pas tarder à impacter la région.