C'est sur la pointe des pieds que la rentrée sociale 2012
s'est effectuée. Hormis le changement de gouvernement, même si c'est trois mois
après les législatives, et une timide rentrée scolaire, rien n'indiquait qu'en
Algérie il y a eu une reprise des activités gouvernementales. Pour certains,
c'est normal, puisque il y a eu un changement de gouvernement, avec le départ
d'Ouyahia et l'arrivée d'Abdelmalek Sellal, qu'on dit politiquement incolore.
Or, cette rentrée sociale, même si elle s'est faite dans la plus extrême
discrétion, le nouveau Premier ministre, comme à son habitude d'ailleurs
lorsqu'il avait des portefeuilles ministériels, a fait en sorte qu'il n'y ait
pas trop de remous dans les dossiers chauds qui l'attendent, et qu'il doit
prendre en charge en urgence. Sur le front social, cela bouge et les syndicats
des enseignants, des personnels de la santé et des médecins attendent une
réponse, sinon une prise en charge de leurs revendications. En fait, des dossiers
chauds et urgents sont sur la table du Premier ministre: habitat, relogement,
routes, électrification, construction de structures scolaires et de santé,
développement local sont les grands chantiers qui attendent M. Sellal sur le
plan local. Car les besoins des populations de l'intérieur du pays, du Sud et
des zones frontalières sont tout aussi importants que ceux des habitants des
grandes villes du pays. Et puis, il y a surtout la poursuite du plan
quinquennal de développement, avec un plan de charge en termes de travaux
phénoménal: achèvement de l'autoroute Est-Ouest, programmes d'habitat dans les
grandes villes du pays, gérer la grogne sociale, et en parallèle assurer une
difficile paix sociale. C'est là par ailleurs un des dossiers prioritaires de
M. Sellal, qui va pourtant évoluer sur un terrain marécageux: hausse des prix à
la consommation, dérégulations du marché des produits agricoles, hausse du
chômage (?+10% à fin juillet dernier), et maîtrise de l'inflation sur fond de
gonflement de la demande sociale, autant de chantiers qui attendent d'être
sérieusement pris en main. D'autant que la rue bouillonne ces derniers jours
après la décision des autorités d'interdire les marchés informels, au moment où
les indicateurs sociaux sont au rouge. Le Premier ministre serait bien avisé de
prendre en charge ce dossier, puisque les marchés informels font vivre des
dizaines de milliers de famille, souvent dans des régions où les opportunités
d'emplois sont inexistantes. Sur le volet politique, les choses sont plus
aisées, la tâche facile, même si les dérapages ne sont pas loin. Le
gouvernement doit en fait préparer dans de bonnes conditions les prochaines
élections locales, que beaucoup de partis veulent en faire un tremplin pour
mieux être représentés au niveau des collectivités locales. Les élections pour
le renouvellement des élus locaux (APC et APW) sont importantes pour beaucoup
de partis, dont le RCD qui a annoncé sa participation, alors qu'il avait
boycotté les législatives. Il y aura, c'est sûr, de la bagarre, et les déboires
actuels et à venir du plus vieux parti algérien ne manqueront pas de prendre un
peu de temps du Premier ministre, et son ministre de l'Intérieur. Et, même si
les affaires étrangères restent du domaine exclusif de la présidence, M. Sellal
aura, c'est évident, à gérer le délicat dossier malien, les questions de
sécurité au Sahel, et globalement la donne sécuritaire à l'intérieur et dans le
pourtour des frontières. Par ailleurs, pour le camp des ?'démocrates'',
l'action de M. Sellal sera jugée à l'aune de l'ouverture politique, du respect
des libertés et moins de pression sur les défenseurs des droits de l'homme,
ainsi que l'arrêt de leur harcèlement. Pour autant, M. Sellal devrait évoluer
sur du velours sur le plan économique: les réserves de change sont de 186,32
milliards de dollars et la dette extérieure est à 3,9 milliards de dollars à
fin juin 2012. Les cours moyens du pétrole sont à plus de 110 dollars le baril,
ce qui devrait donner du mou à la politique économique du gouvernement. A
charge pour lui d'ouvrir le jeu en direction des PME.