Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Une campagne aussi terne et désertée qu'à son début

par Kharroubi Habib

La campagne électorale entre dans sa deuxième semaine sans que les partis anciens ou nouveaux qui participent parviennent à capter l'attention publique sur les réunions et autres manifestations qu'ils organisent. Bien peu d'entre eux en effet réussissent à faire le plein des salles où leurs orateurs s'expriment. Certains et non des moindres dont la capacité en la matière a pourtant fait ses preuves ont dû carrément déprogrammer ici ou là leur opération électorale faute d'auditoire. Il est hasardeux au constat des «performances» électorales des formations politiques en la première semaine de la campagne d'entrevoir que l'ambiance de celle-ci va s'animer. Quand simultanément dans une même ville ces partis tiennent meetings sans pour autant que cela suscrite un semblant d'effervescence électorale au sein de la population, c'est le signe que les citoyens s'en désintéressent de façon inquiétante.

Au déroulé de cette première semaine de campagne électorale, les partisans du boycott du scrutin ont toutes les raisons d'estimer qu'ils sont en phase avec l'opinion publique. Le spectre de l'abstention massive le 10 mai plane en effet à travers l'attitude citoyenne consistant à «zapper» tout ce qui a trait à la compétition électorale en cours. L'indifférence populaire pour celle-ci a des raisons qu'il ne faut pas attribuer à la seule force de persuasion des arguments des quelques formations politiques appellant au boycott des élections.

La campagne électorale bute sur un climat de mécontentement social très lourd provoqué par une détérioration sans précédent du pouvoir d'achat et des conditions de vie de l'immense majorité des citoyens. Le père de famille frustré et humilié de ne pouvoir satisfaire au minimum vital de ses proches, la ménagère qui désespère devant l'impossibilité de remplir son couffin ne sont pas en disposition d'esprit de se sentir concernés par une compétition électorale dont ils ne voient pas en quoi les résultats qui en découleront au scrutin vont contribuer à les soulager de leurs préoccupations existentielles. Et ce n'est certainement pas la sulfureuse et négative réputation qui entoure chez nous la fonction de député et les intérêts animant ceux qui y postulent qui les poussera à vouloir y participer.

Il ne faut pas s'étonner par conséquent que l'agitation des partis et de leurs candidats, que leurs appels aux citoyens à participer au vote tombent à plat et que l'enthousiasme populaire ne soit pas au rendez-vous des manifestations électorales qu'ils animent. Pourront-ils inverser la tendant et réveiller l'intérêt populaire dans les jours de campagne qui leur restent ? Opération qui leur sera difficile à rendre possible au regard des incohérences, de l'irréalité des programmes électoraux qu'ils développent. Que les «ténors» - au charisme pour certains établi - sur lesquels comptent ces partis pour drainer la foule à leurs rassemblements se retrouvent à haranguer des parterres clairsemés, c'est en cette étape de la campagne un signe qui n'est guère encourageant sur la nature de la participation populaire au scrutin du 10 mai. Ceux qui appellent à cette participation se trompent s'ils pensent qu'il suffit d'étouffer les voix des partisans du boycott, ce que font arbitrairement les autorités, pour que s'inverse la tendance abstentionniste qui prédomine en ce moment dans l'opinion publique.