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Une performance qui n'en est pas une

par Kharroubi Habib

Le seuil des deux milliards de dollars pour les exportations hors hydrocarbures a été dépassé en 2011. Selon le ministre du Commerce Mustapha Benbada, ces exportations ont atteint les 2,15 milliards de dollars, soit en hausse de 40,83% comparativement à ce qu'elles ont été l'année précédente. Pour le représentant du gouvernement, c'est là une «performance» réalisée qui dénote que les choses évoluent positivement en ce domaine. L'on ne peut que se réjouir avec lui que les exportations hors hydrocarbures du pays ont franchi ce seuil «psychologique» des deux milliards de dollars. Mais sans nous départir de la conviction que cette «performance» n'en est finalement pas une en ayant eu lieu en 2011.

Il faut en effet se rappeler que ce seuil des deux milliards de dollars à atteindre ou dépasser pour les exportations hors hydrocarbures a été fixé dans les débuts des années 90 quand l'enveloppe des importations algériennes était de l'ordre de la dizaine de milliards de dollars. Deux milliards de dollars signifiaient dans le contexte de l'époque que l'Algérie allait être en situation de réduire sa dépendance aux hydrocarbures en matière de financement de couverture des importations nécessaires à ses besoins. En 2011, l'Algérie a importé pour 46,45 milliards de dollars et rapporté à ce chiffre, celui réalisé par ses exportations hors hydrocarbures fait apparaître que sa dépendance aux hydrocarbures s'est accrue dans des proportions sidérales.

Pour en rester au ratio que les gouvernants des années 90 ont déterminé pour fixer le seuil de deux milliards de dollars pour les exportations hors hydrocarbures, il aurait fallu que celles-ci atteignent au moins les six à 8 milliards de dollars en 2011.

L'on est loin du compte. Ce qui pose le problème de savoir pourquoi elle en est là alors que les gouvernants depuis le début des années 90 sont censés avoir suivi des stratégies de développement conçues pour la sortir de cette dépendance. Près de deux décennies de pratique de ces stratégies ont fait que l'Algérie a toujours une économie rentière privilégiant l'import et empêchant l'émergence d'une économique productive de richesses susceptibles d'être en partie écoulées sur les marchés internationaux et d'être donc génératrices de rentrées financières. Comparée à ses voisins, Maroc et Tunisie, elle est en la matière un nain économique.

Les deux milliards de dollars que lui procurent ses exportations hors hydrocarbures sont une goutte d'eau comparés aux dépenses qui sont les siennes pour couvrir ses besoins alimentaires et autres. Moins que ce débourse le pays pour la seule importation des céréales.

Autant dire que sans les rentrées des hydrocarbures, il n'aurait pas un sous vaillant pour assurer les besoins primordiaux de sa population. A y regarder de près, la situation réelle du pays est plus dramatique au plan économique qu'elle ne l'était à la fin des années 80.

C'est que les besoins de la population ont eu depuis une courbe exponentielle alors que ses capacités à les satisfaire se sont rétrécies, laminées par des politiques économiques. Le secteur de production public a été démantelé, le privé national découragé d'entreprendre, au profit des adeptes de l'économie du «container». Plus que jamais, l'Algérie a son destin tributaire de la cote des prix des hydrocarbures.