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Républicains et démocrates au pied du mur

par Kharroubi Habib

L'islamisme politique en Algérie n'a pas abandonné son projet d'instauration d'un Etat théocratique, et son aile extrémiste, sa réalisation par la violence et la terreur terroriste. Les républicains, laïques et démocrates que compte le pays ont parfaitement conscience que les partisans de ce projet rétrograde le remettront sur le tapis dès qu'ils sentiront la situation dans le pays propice à leur retour sur la scène politique.

 Pour autant, républicains, démocrates et laïques semblent ne pas se préoccuper de ce rendez-vous pris par les islamistes. Car s'ils le sont, ils doivent, toutes autres affaires cessantes, réfléchir à la création d'un cadre de rassemblement pour toutes les forces politiques et sociales opposées au projet islamiste. Il ne suffit pas de proclamer que le projet démocratique est majoritaire au sein du peuple algérien pour que soit mis en échec celui de la théocratie prôné par les islamistes.

 Que l'on ne s'y trompe pas : les islamistes ne manqueront pas de vouloir détourner au profit de leur projet le changement et l'ouverture politique qui vont inéluctablement se produire dans le pays. Le terrain leur sera d'autant propice pour faire ce détournement si le courant républicain moderniste persiste dans ses divisions et son impuissance à fédérer les forces du changement favorables au projet démocratique. C'est par ailleurs en jouant sur l'impuissance persistante du courant républicain moderniste à proposer une alternative crédible que le pouvoir en place se présente comme le seul rempart à la menace du projet théocratique de l'islamisme politique. Et l'imposture fonctionne au sein de cette partie de l'opinion publique qu'effraie la perspective d'un retour en force de l'islamisme politique sur l'échiquier national et que ne rassurent pas l'émiettement du camp républicain et ses controverses puériles.

 En Algérie, tout comme en Egypte, en Tunisie et partout ailleurs dans le monde arabe où souffle le vent du changement, ce qui résultera de celui-ci ne sera pas forcément ce qu'espèrent les militants de la démocratie et de la modernité. Pour faire barrage au projet islamiste, ces derniers doivent impérativement faire front commun en renonçant à leurs querelles de chapelles et de personnes, et pour certains d'entre eux, à ne plus se «tromper de société» dans le programme et les solutions qu'ils proposeront au peuple algérien en guise de projet républicain et démocratique.

 Il ne faut pas croire que le passage par la case islamiste pour le monde arabe affole les puissances occidentales et leur fera adopter une position de franche solidarité avec les républicains démocrates de cette partie du monde. Cyniques, ils sont prêts au deal avec les islamistes, qui, cyniques tout autant, leur donneront tous les gages qu'ils voudront, que leurs intérêts géostratégiques et économiques seront préservés dans ce cas de figure.

 Autant dire à ces républicains et démocrates qu'il leur faut compter d'abord et avant tout sur leur capacité à gagner leurs peuples au projet de société pour lequel ils luttent.