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L'épaisse strate

par Abdou BENABBOU

Alors que le brasier social semble vouloir perdurer en France, la puissante Allemagne devra connaître ce lundi la paralysie des transports avec promesse de répéter les manifestations et les grèves. Pour sa part, la Grande-Bretagne à l'image d'autres pays européens n'a pas été en reste et avait pris les devants dans la protestation et la colère des travailleurs.

Les causes des discordes mises en avant sont variées. Entre grèves et manifestations de rues, chacun a choisi sa recette pour qu'en définitive toutes les réclamations, parfois faites avec casse et violences, se résument à la dénonciation de l'implacable avancée du besoin pour les uns et de la misère pour d'autres.

Jeudi, des centaines de milliers de Français, jeunes et moins jeunes, sont descendus dans les rues de toutes les villes pour réclamer le retrait de la nouvelle loi sur les retraites et la démission de la Première ministre. En Allemagne, on va pointer du doigt l'inflation et exiger des améliorations salariales comme l'avaient fait les Britanniques, les Portugais et d'autres avant eux. Aéroports perturbés, vols annulés, la puissante Allemagne doit elle aussi se soumettre aux aléas provoqués par une crise économique mondiale qui a frappé partout.

Pour le moment, les Français s'en tiennent à un bras de fer prenant de l'ampleur avec leur président qu'ils accusent de s'être paré d'une couronne royale et rejettent ses apparats de dictateur en imposant une réforme des retraites. En resteront-ils là, dans la mesure où le dossier de la retraite n'est qu'une semence de la colère parmi de nombreuses autres ? Plusieurs indices annoncent des turbulences sociales plus vastes dans un futur proche.

Les gouvernements peuvent tomber dans une Europe où la vie politique et économique s'est toujours opérée en coupes réglées. Il est douteux que des changements d'équipes gouvernementales puissent changer quelque chose car aucun pays ne vit en autarcie. L'enchevêtrement mondial des faillites politiques, des larges gangrènes économiques, des pandémies successives est si fort qu'il est devenu impossible à démailler. C'est que la mal-vie n'est plus une fine croûte à gérer, mais une épaisse strate à laquelle les peuples doivent s'adapter.