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La tomate à la pièce et une école contre le gaspillage

par Abdou BENABBOU

Quiconque ne s'attendait pas à ce que la ménagère britannique se voit imposer de n'avoir la latitude d'acheter que trois tomates. Pas plus et on ne sait pas qui du marchand de légumes ou de la tomate imprime cette déconcertante dictature. En Angleterre, on s'est trop loin éloigné des bouteilles de lait entreposées chaque matin au-devant des portes de Trafalgar Square ou de Soho et la disparition de cette culture particulière chez les Anglais indique qu'une disette tentaculaire a obscurci la consommation des familles.

L'embrouille n'est pas l'apanage des Britanniques seuls. La malaisance des frigos en déchéance et des tables dégarnies s'est généralisée et des terriens se nourrissent et se gavent maintenant avec les marches de protestation dans les rues. Mais il s'avère que les récitals bruyants dans les boulevards ne sont plus qu'une adaptation à la résignation des populations qui ont fini par boire une désespérance d'un monde totalement bouleversé.

La tomate algérienne a elle aussi noué avec ses caprices. A plus de 200 dinars le kilo, elle a sorti ses cornes. L'oignon à 180 dinars s'est mis de la partie pour ne pas être en reste. Le ministre du Commerce se démène ces dernières heures pour stabiliser un marché habituellement vorace pendant le mois du ramadhan. Peine peut-être perdue car la perversité n'est pas dans les étalages. Elle est dans les élans désorganisés et incontrôlés des consommateurs. Sauf qu'en la matière et par la contrainte de la désuétude du portemonnaie, ce n'est pas le marchand de légumes qui imposera son dictat comme à Londres ou ailleurs. Depuis la rampée de l'inflation, dans leur douleur, la majorité des ménages ont été obligés de se plier au sens de la mesure et de celui de la parcimonie. L'aura du kilo a laissé place à l'obligeance de l'achat à l'unité et à la pièce et les commerçants ont perdu leur superbe pour adopter tous les lexiques de la bienvenue.

La crise économique et sociale mondiale, malgré les multiples déphasages qu'elle a provoqués, aura eu au moins un effet positif. Elle a donné un sens à l'argent et s'est investie en école contre le gaspillage.