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L'autre drame

par Mahdi Boukhalfa

La rentrée scolaire de cette année sera stressante et ne diffère pas tellement de celles de ces dernières années : dans le cartable des plus de 9,2 millions d'élèves qui vont rejoindre les bancs des écoles, il y aura fatalement beaucoup de problèmes à résoudre, dont le plus récurent, celui de la surcharge des classes. Comme un vieux serpent de mer, cette problématique revient chaque année sans que le ministère n'arrive à la résoudre, si ce n'est par des déclarations faites juste pour faire patienter l'opinion publique. La question mérite cette fois-ci d'être soulevée et portée au-devant des préoccupations du gouvernement qui n'a pas trouvé mieux cette année que de proposer des chalets pour les élèves afin de surmonter le manque et l'indisponibilité de structures scolaires.

L'actuel gouvernement, qui a déjà levé le gel de la construction d'infrastructures scolaires depuis le début de l'année, devrait accélérer la cadence de réalisation des écoles pour au moins se dédouaner d'une décision irrationnelle, celle de geler pour des considérations financières le programme de constructions scolaires. Aujourd'hui, les classes des écoles algériennes sont non seulement surchargées, mais surtout connaissent une promiscuité qui ne favorise guère le développement de la connaissance. L'écart est trop important entre l'école algérienne, avec ses tares et ses déboires pédagogiques, ses réformes alambiquées décidées tous les quatre à cinq années, le faible niveau d'enseignement, un système d'examens éculé, et ce qui se fait dans la région. Certes, le nombre d'élèves en hausse constante d'année en année, conséquence d'un taux de natalité jamais maîtrisé, est le principal accusé dans cette situation de hausse tous azimuts de la demande en matière d'enseignement.

Pour autant, les responsables du secteur comme le gouvernement ne peuvent et ne doivent en aucun cas se dérober à leurs responsabilités devant un cas d'école dans le monde : l'Algérie est le seul pays qui a appliqué le plus de réformes scolaires en moins de 20 ans. Résultat : l'enseignement s'est retrouvé déboussolé, décrédibilisé, avec une baisse préoccupante du niveau d'instruction et du savoir au sein de l'école algérienne, au point que les plus hautes autorités du secteur, et même au sein du gouvernement, n'ont pas rougi lorsqu'elles ont eu recours à la coupure de l'Internet pour empêcher la fraude au plus prestigieux des examens, le baccalauréat. La complicité entre plusieurs ministères pour accomplir ce forfait pédagogique est par ailleurs révélatrice de l'extrême délitement des responsabilités et des compétences au sein d'un secteur prioritaire, dont le budget annuel est le second plus important du gouvernement. Alors, où est la faille ?

En fait, il n'y a pas de faille dans le système éducatif algérien, mais tout simplement une affreuse perte de logique et de bon sens dans la conduite des missions de l'école, avec cette tare typique à la « açabya » ou la psychosociologie de l'Algérien, symbolisée par un entêtement dramatique de responsables à ne pas s'écouter et écouter les autres, à mettre en place la bonne gouvernance de l'école, mais seulement à n'appliquer que sa stratégie, même si elle est suicidaire. Même si elle doit faire couler l'école elle-même. Le drame de l'école algérienne est là.