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Que de temps perdu

par Mahdi Boukhalfa

Que s'est-il passé entre le mois de février et ce début de printemps pour que le ministre de la Santé fasse machine arrière et accède pratiquement à l'ensemble des revendications des médecins résidents ? Le compte rendu de la réunion de dimanche entre M. Hasbellaoui et les représentants des médecins résidents est porteur de grands espoirs pour que cette déplorable crise qui frappe de plein fouet l'un des secteurs vitaux du service public prenne fin. Les propositions, cette fois-ci, du ministre sont plus conformes aux revendications sociales des résidents. Ceux-ci, et en attendant leur décision finale sur le ?'plateau garni'' offert par le ministre, ont pratiquement obtenu une victoire importante dans leur bras de fer avec les pouvoirs publics, autant avec leur ministère qu'avec les autres départements ministériels, dont celui de l'Enseignement supérieur et la Recherche scientifique.

Pour en arriver à ces concessions, car il faut bien nommer les propositions du ministre, les membres du Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra) ainsi que beaucoup de médecins ont été, il faut le souligner, injustement ?'bastonnés'', embarqués dans des fourgons de police comme des prévenus de droit commun pour avoir simplement manifesté en pleine rue leur ras-le-bol d'une situation de blocage de leurs revendications ou pour avoir manifesté leur soutien à leurs camardes qui devaient boycotter le premier examen du DEMS. Un tel acharnement contre cette corporation, même si quelque part elle a, elle également, sa part de responsabilité dans cette scabreuse situation, qui a refusé le diktat de l'autorité de tutelle est incompréhensible, étrange. Jusqu'au Premier ministre qui avait vilipendé le mouvement de grève du Camra.

Que dire sur ce dossier sinon que les ministres de la Santé, de l'Enseignement supérieur, ainsi que le Premier ministre, ne semblent pas avoir suivi à la lettre la feuille de route du président Bouteflika. Eux et tous les responsables de l'Etat, les ministres comme les SG des partis du FLN ou du RND, qui s'en gargarisaient et assommaient à tout bout de champ leurs interlocuteurs, ont oublié d'appliquer, le moment venu, cette feuille de route du chef de l'Etat: le dialogue et la concertation pour résoudre les conflits. Pour avoir foulé aux pieds cette importante philosophie de gouvernance prônée par le président Bouteflika, le gouvernement a non seulement fait perdre au pays quatre précieux mois avant de se décider à résoudre la crise des médecins résidents par le dialogue, mais, au plus fort de son entêtement, a fait bastonner ses étudiants, ses futurs médecins, ceux qui soulagent les maux et les douleurs de ceux qui n'ont que les hôpitaux bien algériens pour vaincre leurs maladies.

Dans le fond, qu'ont demandé de si impossible à réaliser ces médecins résidents que certains milieux politiques proches du pouvoir ont tenté de diaboliser ? Rien de plus que le minimum vital, des conditions de travail et de vie décentes pour exercer dans des structures hospitalières inhospitalières dans les régions isolées du pays, dans le Grand Sud, dans les Hauts Plateaux. Pourquoi tout ce temps pour s'obliger à accéder aux plus simples des revendications d'une corporation qui, à elle seule, tient entre ses mains toute la douleur et toutes les frustrations des Algériens pour un accès à un système de santé qui équivaut au moins à son pesant de budget annuel, l'un des plus importants avec celui de l'Education nationale ? Et, même si les médecins résidents sont, de leur côté, tout à fait blâmables pour avoir réduit au maximum l'activité hospitalière, sachant que ce sont les citoyens qui en sont victimes, il est grand temps pour que les institutions du pays prennent dorénavant les chemins de la bonne gouvernance, du dialogue et non de la trique pour fuir leurs responsabilités quant à l'amélioration des conditions de vie de leurs concitoyens.