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LE BAC, PUERIL SUBSIDIAIRE

par M. Abdou Benabbou

Faut-il reculer la date des examens du bac ? Tantôt sourde, tantôt assourdissante, cette interrogation frise un état d'inconscience qui est au cœur de la culture qui consiste à engouffrer les poussières sous les tapis. Le débat, nourri entre différents concernés dans de multiples couloirs, se focalise sur une piste aléatoire privilégiant une date plutôt qu'une autre pour, comme toujours, parer aux menues urgences et au plus pressé.

On sait ce que vaut aujourd'hui ce prétendu diplôme dont la teneur n'est plus une consécration mais un trompe-l'œil et un faux tremplin social. Et des faux tremplins du genre sont devenus pléthore à mille lieues des vraies préoccupations de l'heure.

Les dernières et brûlantes ébullitions sociales dans le monde de l'éducation et du travail ne représentent pas de simples étincelles et toutes les revendications réclamées à cor et à cri, au demeurant légitimes, ne devraient pas être considérées seulement comme d'intempestives sautes d'humeur ou comme de simples turbulences téléguidées. Parallèles, les unes et les autres elles devraient renvoyer à la profondeur d'un dilemme vécu par le monde entier.

Partout, les diplômes et les fiches de paie n'ont plus l'arôme du pain et la question du recul de la date des examens du bac a l'ostentatoire du puéril subsidiaire. Accéder à un monde totalement désarticulé du travail pour le bien vivre ou pour le mieux vivre n'a plus comme sauf-conduit une quelconque certification d'études douteuses qui ne répond plus à ce nouveau siècle et à son devenir. Dans des pays autrement plus avancés et plus développés, près de 30% de la population vit dans la pauvreté faute de n'avoir pas su et pu entrevoir la recette idéale pour manger à sa faim. Elle aussi, faute de mieux, s'est fourvoyée dans les faciles accrocs de rues, incapable d'ouvrir les yeux sur la nécessité pour les humains de s'adapter à la mue qu'exige la révolution gigantesque et sourde de ce nouveau siècle.

Ce que l'on appelle le bac n'est plus dans le terrain de ce que l'on appelle l'école pour persister encore à se soucier de sa date. Avec l'atelier, l'usine, le robot, le voisin d'ici et d'ailleurs, et tous ces lourds ingrédients qui nous refaçonnent, il est dans la capacité d'anticipation pour savoir quel monde nous aurons demain, après-demain et tout à l'heure.