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Cercle vicieux

par Mahdi Boukhalfa

Terribles révélations d'un ex-PDG de Sonatrach selon lequel l'Algérie ne produit plus assez de pétrole. Des affirmations qui expliquent la volonté du gouvernement de revoir la loi sur les hydrocarbures, les deux précédentes moutures ayant été faites alors que le baril était dans une fourchette dynamique, à plus de 100 dollars le baril. Aujourd'hui, l'équation a changé, les données sociales et économiques également. D'abord, les découvertes annoncées ces dernières années ne sont pas aussi importantes qu'attendu, ensuite elles sont faibles en volume et enfin elles ne sont pas rentables commercialement.

Du coup, ce sont toujours les anciens puits qui assurent l'essentiel de la production, autant pour les exportations que pour la consommation en interne. Mais, la cadence ne peut durer indéfiniment et donc le gouvernement est fatalement amené à revoir certains chapitres de la loi sur les hydrocarbures qui n'attire plus les investisseurs étrangers, refroidis par une fiscalité pétrolière trop rigide, trop tatillonne et soumis à une bureaucratie de tous les instants. Or, comme un malheur n'arrive jamais seul, les recettes pétrolières ne sont plus du même niveau que celles du milieu des années 2010, et donc une révision de la loi sur les hydrocarbures ne sera qu'un autre ajustement administratif qui sera tôt ou tard revu, si des changements importants ne sont pas pris en compte, à commencer par la mise en place d'une fiscalité pétrolière plus attractive, moins de bureaucratie et, surtout, que l'épée de Damoclès suspendue sur la tête des cadres gestionnaires du groupe soit levée.

Car la dépénalisation de l'acte de gestion n'est pas encore effective, ce qui en l'espèce inhibe nombre d'initiatives et de décisions dans un secteur qui ne peut s'accommoder d'une administration tatillonne ou de centralisation de la décision. Le fait est que le pays, à défaut d'une industrie performante, d'une agriculture orientée vers les marchés extérieurs, est toujours dépendant des rentrées de son commerce extérieur tirées des ventes d'hydrocarbures. Face à cette situation de sinistrose, inquiétante avec d'un côté une hausse de plus en plus accélérée de la consommation interne et de l'autre une baisse de la production sur fond de recul des quantités exportées, certains estiment qu'il faut aller vers d'autres sources d'énergie pour la consommation locale et laisser le gros de la production pour l'exportation. Une éventualité qui ne fait pas l'unanimité, car on estime que la seule solution est la révision de la loi sur les hydrocarbures qui devrait libérer complètement le champ aux énergies non conventionnelles pour augmenter la production de gaz notamment.

Plus qu'une nécessité, ce sera le seul chemin à prendre, autant pour le gouvernement que pour certains experts, pour compenser d'une part la faiblesse de la production d'hydrocarbures et d'autre part répondre dans des conditions confortables à la hausse de la demande locale en énergie, que ce soit sur l'électricité, produite à 73% à partir du gaz ou sur les produits pétroliers. C'est un cercle vicieux et les conditions sociales et économiques actuelles et à venir, avec un programme de construction de plus de 1,6 million de logements, d'infrastructures scolaires, d'équipements lourds comme les routes et les barrages, ne donnent que peu de marge de manœuvre avec des recettes pétrolières d'un peu plus de 30 milliards de dollars. Avec le conventionnel, cela ne suffira pas et le stress financier même avec «la planche à billets» sera insupportable. D'où le recours, même «à pas feutrés», au gaz de schiste. Il a ses détracteurs, mais surtout ses défenseurs.