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Alger, ce bon samaritain

par Moncef Wafi

Messahel à Doha, l'information aurait pu n'avoir qu'une lecture purement nationale mais vu du contexte de crise qui perdure entre le Qatar et ses voisins immédiats du Golfe et de plus loin, il est légitime de s'interroger sur le menu bilatéral au programme. Si le communiqué du ministère des Affaires étrangères l'inscrit «dans le cadre de la poursuite de sa tournée (celle de Messahel) dans le monde arabe» menée sur instruction du président de la République, lui conférant le cachet d'«une visite de travail», il serait candide de croire que sa présence dans la capitale qatarie ne va pas déborder sur cette question.

Alger qui a joué la carte du non alignement au tout début de ce conflit a bien fait de ne pas s'impliquer directement en prenant position pour l'un des protagonistes. D'une part, l'Algérie respectait sa propre charte et de l'autre évitait de se faire un ennemi de plus dans un contexte régional sous tension, même si Riad n'est pas franchement ce qu'on peut appeler un allié à toute épreuve. Les Algériens savent pertinemment que la persistance de la brouille dans le Golfe ne peut que leur nuire à plus ou moins moyen terme avec tous les dangers de l'éclatement d'un conflit armé par procuration ou une influence néfaste sur les prix du gaz et du pétrole dont les effets pervers ne sont pas à exclure. C'est en quelque sorte par intérêt qu'Alger est intervenue en tant qu'intermédiaire pour essayer de rapprocher les points de vue des uns et des autres, appelant comme à ses habitudes au dialogue.

Cette visite, entre autres missions, devra certainement tenter de relancer les démarches entreprises par l'Algérie, elle dont le chef de la diplomatie avait reçu séparément, en juin dernier, deux hauts responsables du Qatar et des Emirats arabes unis. Le sujet n'est pas à chercher loin puisqu'il a concerné cette crise où Alger est fortement sollicitée pour apporter sa contribution. La position algérienne, si elle est appréciée par Doha qui l'a jugée «honorable», n'est pas forcément du goût des Saoudiens qui y voient une autre bravade faite à leur leadership après le refus des Algériens de rejoindre la coalition arabe en guerre au Yémen. Dans la logique tribale des Al Saoud ou tu es avec eux ou contre, la troisième voie n'existant pas. Même si le poids de la diplomatie algérienne joue actuellement dans les catégories «mouche» et «plume», le pays continue de se cantonner dans son rôle de bon Samaritain arborant comme principes inaliénables ceux du bon voisinage, de non-ingérence dans les affaires internes des Etats et du respect de leur souveraineté nationale.