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Des licences sur mesure

par Moncef Wafi

Après les pommes des Alpes, la céramique de Castellón figure parmi les victimes collatérales des licences d'importation imposées par le gouvernement algérien. Une décision qui commence à faire trembler l'Europe et les pays exportateurs qui y voient un «blocus de facto» de leurs produits écoulés sur le territoire national. Si Bruxelles a été rassurée par Alger qui, après avoir rendu publique la liste des 21 produits éligibles à la licence d'importation, a donné le feu vert à l'importation des contingents tarifaires pour 2017, bénéficiant de préférences douanières dans le cadre de l'Accord d'association avec l'Union européenne, d'autres Etats font le forcing pour placer leurs produits vitaux pour leurs économies respectives.

Pourtant, ces licences, décidées par la nécessité d'identifier les besoins et d'arrêter le gaspillage, ne peuvent pas échapper à une lecture politique puisqu'elles permettent de contrôler ou plutôt de justifier la paralysie d'une économie construite sur l'importation de tout et de rien. La non-délivrance des licences pour certains produits à l'exemple du rond à béton, en plus de créer le besoin, excuse une forme de cessation de paiement vis-à-vis des entreprises contractuelles. Ces pénuries artificielles concernant les matières premières impactent négativement les calendriers de fin de projets, soumettant de fait les entreprises réalisatrices à des pénalités de retard. L'Etat repousse ainsi les échéances de paiement sans se déclarer officiellement en faillite.

Ces licences servent également à approvisionner cette fameuse paix sociale comme l'atteste la délivrance spécial Ramadhan de 19 licences d'importation de la viande rouge fraîche. Le gouvernement, conscient de la particularité de ce mois, craignant une vague de contestation citoyenne principalement après le désaveu des législatives, est en train de tout faire pour éviter de se faire déborder par la rue. Il n'est un secret pour personne que le Ramadhan a, paradoxalement, l'effet inverse sur les Algériens qui n'y connaissent, pour certains d'entre eux, aucune limite dans l'excès. C'est dire la sensibilité du moment. Après le mois de jeûne, advienne que pourra semblent dire les événements. Pourtant les sujets d'inquiétude du gouvernement ne manqueront pas.