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La hantise de l'abstention

par Moncef Wafi

Les Algériens sont appelés demain à voter pour un nouveau Parlement qui devra siéger, théoriquement, pendant cinq ans. Après une campagne électorale insipide, incolore et légère sur les plans politique et économique, le jour du scrutin s'annonce périlleux pour un gouvernement qui a multiplié, ces derniers jours, ses appels pour une large participation populaire. Même le Premier ministre s'impliquera personnellement dans cette mobilisation devant le désintérêt affiché pour la circonstance.

Plus que le boycott, l'abstention est le cauchemar permanent du régime qui cherche une caution citoyenne à des élections dont les résultats sont courus d'avance. En effet, si le boycott est un acte politique, son impact sur la société reste très restreint du fait même de ses partisans. L'abstention, par contre, est l'expression ultime et silencieuse d'un peuple qui ne veut plus se faire manipuler ni par le pouvoir ni par l'opposition. Une réponse à une gouvernance incapable de trouver des solutions à la crise si ce n'est en ponctionnant les salaires à travers les augmentations. L'abstention, plus qu'un acte politique, est un acte citoyen, même s'il peut conduire à des scénarios improbables, mais ailleurs, où le jeu électoral obéit à des lois démocratiques.

Cette crainte de voir les Algériens confirmer leur défiance des élections transparaît dans les injonctions, les menaces et les rappels à l'ordre d'un staff gouvernemental sur le pied de guerre et dans les discours populistes des partis tout au long de ces trois semaines de campagne. Demain, les urnes devront consacrer un statu quo partisan avec les mêmes partis qui formeront la majorité parlementaire et une chambre basse jumelle de sa sœur sortante. L'opposition sera partagée entre quelques strapontins pour avoir répondu favorablement à l'invitation au vote. D'autres sigles verront leur quota augmenter ou diminuer, selon les tendances actuelles.

Ce qui est certain pour le moment, c'est que l'Algérie héritera encore d'un nouveau Parlement aux ordres, incapable de mener sa mission de contre-pouvoir. Les Algériens devront supporter des parlementaires qu'ils n'ont pas élus dont le niveau d'instruction, pour certains, ne leur permet même pas de comprendre les urgences de l'heure. Si les dés sont jetés et le double six de sourire à qui on devine, le reste de la partie est déjà joué.