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Violence, au delà du constat

par Moncef Wafi

La violence en milieu scolaire a maintenant un visage ou plus précisément un âge et un palier éducatif. Selon une étude réalisée par le ministère de l'Education nationale, 52% des cas de violence ont été enregistrés en 2016 au niveau des établissements d'enseignement moyen (CEM). Est-ce pour autant une surprise ? Non, dans la mesure où les pédagogues vous certifieront que l'âge scolaire le plus ingrat est celui du cycle moyen où ils ont à faire à des préadolescents, sortis à peine de l'enfance.

La violence, pourtant, n'est pas de la seule exclusivité des collèges puisque même le primaire a sa part du gâteau avec 35% et, paradoxalement, les lycées ne comptent que 13% des cas recensés. Les statistiques parlent d'elles-mêmes et indiquent que la violence entre élèves est la plus représentative avec 80%. Mais ce qui est inadmissible c'est de voir celle exercée par les élèves à l'encontre de leurs enseignants (13%) et surtout celle infligée aux élèves par le corps enseignant alors que la loi interdit les châtiments corporels en milieu scolaire. Ces dysfonctionnements ne sont pas nés d'aujourd'hui mais le fruit d'une politique inadéquate d'assistanat scolaire forcé obligeant des élèves de 16 ans à côtoyer d'autres de 11 ans.

Cette absence de perspectives à terme, de stratégie d'orientation parascolaire, de précocité dans la formation ont fait de l'école, et du CEM en particulier, un concentré d'une violence juvénile où l'apprentissage du joint et des psychotropes est le prédominant. La ministre Benghebrit a raison de considérer que les élèves en échec scolaire étaient les «plus violents». Un constat, certainement étayé par les chiffres, mais qui ne suffit pas à lui seul pour expliquer pourquoi nos cours d'école et surtout leur périmètre immédiat sont devenus explosifs à ce point. Pourtant, la ministre a un regard réducteur sur la façon de traiter cette violence, car si elle pense réellement que pour en venir à bout, il suffit de traiter les facteurs d'échec scolaire, c'est qu'elle a tout faux. La violence n'est pas une fatalité mais une conséquence sociétale enfantée par de nombreux facteurs qui trouvent racine dans la précarité, l'éclatement de la cellule familiale, la politique éducative officielle, les programmes scolaires, le niveau des enseignants, responsables de violence morale, et l'environnement proche pour ne citer que ces raisons exogènes.

Si le ministère de l'Education planche sur une stratégie pour lutter et prévenir la violence en milieu scolaire, il serait aussi peu judicieux de croire que la seule solution réside dans la matière des sciences islamiques comme cela a été suggéré par le directeur de l'Observatoire national de l'éducation et de la formation. En soulignant, à cet effet, la nécessité d'inculquer aux élèves les préceptes de l'islam, prônant les valeurs de tolérance, d'entraide et de solidarité en milieu scolaire, on fait nécessairement l'impasse sur les valeurs universelles véhiculées par l'humanisme, ostracisant un peu plus les élèves et renforçant les œillères religieuses.