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Ligne rouge

par Moncef Wafi

La 20e tripartite qui s'est tenue à Annaba n'a apparemment pas débouché sur des résolutions qui concernent directement les Algériens. Pas que la rencontre gouvernement-syndicat-patronat aura été une journée stérile puisque débat et propositions y ont été relayés, comme la consolidation du partenariat public-privé, mais parce qu'elle n'aura pas marqué la conscience populaire comme l'a fait sa précédente d'Alger en remettant en cause l'un des acquis sociaux des travailleurs.

Si la rencontre était hautement technique, n'intéressant que peu les non-initiés, on retiendra pourtant cette volonté du gouvernement à médiatiser de nouveau cette «ligne rouge à ne pas franchir» à propos de la préservation du pouvoir d'achat des citoyens. Si les autres questions ne touchent pas ou prou l'Algérien lambda, elles concernent plutôt les milieux d'affaires, le sujet du pouvoir d'achat interpelle. Sellal, en chef des pompiers, est intervenu pour réaffirmer la détermination des pouvoirs publics de préserver ce pouvoir d'achat qui malheureusement s'effiloche de partout. Malgré les effets d'annonce, les menaces contre les spéculateurs de tous bords et les garde-fous érigés en ligne de défense, le constat est accablant et l'Algérien assiste, impuissant, à une dévaluation de son niveau de vie. Les augmentations des prix et des taxes, les décisions, parfois impétueuses, des ministres ont acculé l'Algérien dans ses derniers retranchements financiers.

Le fait d'interdire l'importation de produits agricoles de l'étranger, même si elle est intrinsèquement la bienvenue, a engendré en aval une augmentation affolante des prix du produit local. Les Algériens, s'ils n'achetaient plus la banane à 600 DA le kilo, évitent maintenant la pomme made in bladi à 400 DA. C'est dire si le souci de l'Etat de ne pas se faire déborder sur le plan social est mis à mal par une série de mesures non maîtrisées. Sellal en parlant de ligne rouge à ne pas dépasser oublie que l'Etat lui-même s'est permis de la rendre illisible à travers une succession de lois de finances qui consacrent l'austérité et l'inflation au détriment d'une population à forte dépendance des subventions. Sellal met-il fin ainsi aux demandes du patronat de réduire ou de revoir la politique de l'assistanat à travers la politique des subventions ? Le risque est grand de voir la rue bouger à quelques semaines de législatives déjà mal parties à en croire les listes confectionnées des candidats qui font la part belle aux tenants de la chkara. Mais ceci est une autre question.