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Le «j'accuse» de Zohra Drif-Bitat

par Moncef Wafi

En l'espace d'une poignée de jours, la France s'est rappelé sa période coloniale au bon souvenir des Algériens. Il y a une semaine, le président de l'Association française des familles victimes du terrorisme (AFDT) avait assimilé la bombe du Milk Bar d'Alger en 1956 à un attentat terroriste devant le président de la République française et Hollande d'évoquer, ce dimanche, le «massacre» des harkis après 1962 reconnaissant la responsabilité de la France dans leur abandon.

Si le deuxième acte a de forts relents électoralistes, la première lame est passée dans un silence assourdissant réduisant les Algériens à de simples spectateurs sans réaction si ce n'est sur les réseaux sociaux. L'absence manifeste d'une quelconque réaction officielle du pays, d'ailleurs mal interprétée par les citoyens, a fait réagir en premier la moudjahida Zohra Drif-Bitat qui s'est interrogée sur le silence des représentants de l'Etat censés défendre la mémoire du Premier Novembre. Car assimiler un acte de résistance à un attentat terroriste, c'est remettre en cause même les fondements moraux de la Révolution algérienne, orpheline aujourd'hui de ses véritables héros.

En effet, ni le ministère des Moudjahidine ni l'Organisation nationale des moudjahidine, encore moins le FLN ou les organisations satellitaires n'ont réagi publiquement à cette attaque ni contre les déclarations de Hollande concernant le «massacre» des harkis. Ce silence gêné interpelle les Algériens et doit les interpeller puisque l'histoire même du pays a été revisitée de Paris. Pourquoi personne n'a réagi ? La question est légitime mais la réponse, connaissant les mœurs de gouvernance en Algérie, ne viendra jamais. Dans sa tribune, l'ex-vice-présidente du Sénat accuse plus le silence des autorités compétentes du pays que le président de l'AFDT qui lui est dans son rôle.

Zohra Drif-Bitat n'apporte pourtant aucun éclaircissement ni élément de réponse sur les raisons de cette attitude officielle mais d'aucuns auront compris que les intérêts personnels ont plus de sacralité que le passé révolutionnaire de l'Algérie. Si elle ne le dit pas elle, le peuple pense profondément que l'Algérie de Novembre a été démembrée et vendue à son ancien colonisateur. D'abord sur le plan économique, politique et maintenant idéologique.