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NOVEMBRE EN TEMPS PRESENTS

par M. Saadoune

La commémoration du 1er Novembre ne se discute pas. Honorer ceux qui ont donné leurs vies pour la liberté et la dignité des Algériens est la moindre des choses. Les vicissitudes des temps présents ne peuvent justifier un quelconque dédain à l'égard de ceux qui ont milité dans le mouvement national avant de s'engager - et pour beaucoup de perdre la vie - dans le combat pour l'indépendance. On rappelle cette évidence car, justement, certains, par détestation des temps présents et de l'instrumentalisation de l'histoire par le pouvoir, en arrivent à un rejet «en bloc» et au révisionnisme.

Fort heureusement, l'histoire appauvrie par les pouvoirs politiques a été fortement contrebalancée par une transmission familiale, fondée sur des faits réels et non fantasmés, qui ne laisse pas de champ au discours révisionniste. Cette transmission familiale - qui malheureusement arrive à son terme - permet à de nombreux Algériens de faire la part des choses. Et notamment de ne pas douter de la justesse du combat des parents en raison des tristes évolutions postindépendance évoquées avec une précocité analytique remarquable par Frantz Fanon (en 1961 !) dans le chapitre «les mésaventures de la conscience nationale» des «Damnés de la terre». Il ne faut pas non plus chercher plus loin le rejet massif par les Algériens des «libérateurs» de l'Otan en action en Libye. Les Algériens ont une histoire et des repères. Novembre continue d'avoir du sens même si les promesses de progrès, de justice sont encore loin d'avoir été atteintes. Il a toujours du sens car, ainsi que le soulignait feu Abdelhamid Mehri, si l'indépendance a été plus ou moins obtenue, il reste encore à réaliser le double objectif de la démocratie et du Maghreb.

Novembre est opposable à tous les rentiers de l'histoire pour défendre la démocratie et la levée des barrières que les régimes ont mises à la circulation des hommes et des idées dans le Maghreb. En ce sens, les discours, limités à la sphère officielle ou para-officielle, sur l'exigence d'une «repentance» de la France n'intéressent pas grand monde. La «reconnaissance» que l'on peut effectivement attendre de l'ancienne puissance coloniale n'a rien à voir avec la notion de «repentance» qui paradoxalement arrange bien ceux qui font commerce de la mémoire de part et d'autre de la Méditerranée. Ceci est un autre débat. Sur le fond, ce qui peut intéresser les Algériens, et les plus jeunes d'entre eux, c'est d'être «aujourd'hui» dans l'esprit de Novembre. Les célébrations ont tendance à masquer le vide (voulu) et à réduire le souvenir à des rituels sans lendemain.

LE 1ER NOVEMBRE, DANS LE CALENDRIER DES ALGERIENS, QUI N'EST PAS NECESSAIREMENT CONFORME AUX CELEBRATIONS OFFICIELLES, EST UNE DATE «POLITIQUE» PAR EXCELLENCE. IL N'EST PAS INUTILE DE RAPPELER QUE LE REGIME EN PLACE DEPUIS 1962 N'A EU DE CESSE D'EVACUER LA POLITIQUE, DE L'INTERDIRE ET DE LA BANNIR. C'EST QUE LE PREMIER NOVEMBRE AVEC SES BUTS NON ATTEINTS, INDEPENDANCE, SOUVERAINETE DU PEUPLE, LIBERTE DE L'ALGERIEN, UNITE MAGHREBINE, CONTINUE D'ETRE SUBVERSIF. IL RAPPELLE QUE L'INDEPENDANCE FORMELLE N'EST QU'UNE ETAPE ET NON UNE FIN. ET QU'IMMOBILISME ET NOVEMBRE SONT ANTINOMIQUES. NOVEMBRE EST CONSTAMMENT A FAIRE.