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LE TRAVAIL POUR LA NON-INGERENCE

par M. Saâdoune

L'Algérie, par la voix du président de la République à l'occasion de la récente visite de la ministre française de la Justice, et récemment celle du ministre des Affaires étrangères, a réaffirmé son refus de l'ingérence étrangère dans la région sahélienne et le fait que les questions de sécurité qui s'y posent relèvent exclusivement des prérogatives des Etats de la région.

 La position de l'Algérie a été énoncée avec suffisamment de constance pour qu'elle ne soit pas prise en compte. Mais le poids des intérêts en jeu et les positionnements stratégiques sur cette région riche en ressources minières poussent les Etats extérieurs à ne pas se contenter de «s'intéresser» à la région. La faiblesse structurelle de certains Etats sahéliens les rend très perméables aux sollicitations étrangères. Celles-ci ont trouvé dans la présence des djihadistes de l'AQMI une justification commode de leur volonté d'assurer une présence destinée à assurer une capacité de prise de contrôle direct sur les ressources.

 Dans ces grandes manœuvres, la pénétration économique chinoise méthodique - et jusqu'à présent plus profitable aux pays africains que les longues «amitiés occidentales» - est combattue par la dénonciation d'un «péril jaune» imaginaire. Et par la mobilisation des dirigeants alliés afin de «contenir» les Chinois.

 Il va de soi dans un tel contexte que le discours souverainiste de l'Algérie ou de tout autre pays ne suffira pas à réduire ces entreprises d'ingérence. En premier lieu, même s'il y a une exagération délibérée de la menace que représenterait l'AQMI, il ne faut pas occulter qu'il existe un problème. Et qu'il ne sert à rien de marteler le principe de non-ingérence si le travail de sécurisation et de lutte contre le terrorisme n'est pas mené à bien par les concernés. Il y a nécessairement un travail diplomatique plus dense à mener pour amener les Etats de la région sahélienne à coordonner leurs efforts et leurs actions pour empêcher le renforcement et l'enracinement des activités terroristes dans la région.

 Il est clair, s'agissant du Mali et du Niger, que la persistance d'un problème touareg affaiblit la qualité, officiellement proclamée, de leur engagement dans la concertation régionale. C'est une donnée qu'il faut prendre en compte. Défendre la non-ingérence et la coordination régionale est une option juste, à condition qu'elle n'occulte pas les appréhensions, subjectives et objectives, des autres Etats.

 L'Algérie, qui a déjà contribué à apaiser la situation en favorisant des arrangements entre l'Etat malien et les Touaregs, ne peut l'ignorer. Elle se doit, si elle veut que sa politique ait du sens et soit partagée, de s'intéresser aux questions qui paraissent «principales» aux autres Etats de la région.

 Même si, sur ces questions, l'Algérie n'a pas de pouvoir magique, elle se doit d'y avoir une action diplomatique et politique très active. La lutte contre l'ingérence est une bataille de longue haleine. Son succès dépend clairement de l'efficacité des efforts de l'Algérie et des autres Etats de la région à traiter les problèmes graves qui se posent et qui ne se limitent pas au terrorisme.