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Encore un effort, M. le commissaire !

par  K. Selim

L'association des éditeurs arabes a décidé de boycotter le Salon international du livre (SILA) d'Alger en soutien aux éditeurs égyptiens. C'était malheureusement prévisible et on aurait pu éviter d'être inutilement mis à l'index.

Dans son communiqué, l'association des éditeurs arabes reste dans le minimum syndical et regrette que les organisateurs du salon n'aient pas invité les éditeurs égyptiens. Quant aux arguments avancés pour justifier ce refus de participer au Sila, il faut convenir, hélas, qu'ils ne manquent pas de pertinence. Inutile de jouer sur la fibre patriotique blessée et de lancer des cris d'orfraie. Ne pas inviter les éditeurs égyptiens ne se justifiait pas. Ni les passions liées au football, ni les éructations de quelques journalistes et pseudo-artistes égyptiens contre l'Algérie ne justifiaient que l'on punisse des livres et des auteurs. Que les livres puissent continuer à circuler en dépit des évènements contingents et des différends est un comportement de civilisation. Cet interdit des livres égyptiens ne laissera que des regrets.

Le lendemain de l'annonce de l'association des éditeurs arabes, le commissaire du Sila a affirmé que les «Egyptiens seront là» et qu'il «n'y a jamais eu d'interdiction» !

Tous ceux qui ont lu les déclarations du commissaire ne peuvent qu'être surpris par l'aplomb du propos. Il semble que la librairie d'Alexandrie, invitée par le ministre algérien de la Culture, fera acte de présence et évitera l'absence totale d'une présence égyptienne.

Mais la confusion reste de mise. Le président de l'association des éditeurs égyptiens a indiqué qu'il refusait une présence purement symbolique et a nié qu'il y ait eu concertation à ce sujet avec le commissaire du Sila. D'ici le 27 octobre prochain, date de l'ouverture officielle du salon, les choses vont peut-être bouger davantage. Et la décision de ne pas inviter les éditeurs égyptiens, d'abord pour de douteuses raisons de «nif», et ensuite pour d'improbables angoisses sécuritaires, sera peut-être rapportée.

Il suffit seulement que le commissaire du Sila fasse encore quelques efforts sur lui-même - Mme Khalida Toumi devrait d'ailleurs l'aider à faire cet ijtihad - pour envoyer une invitation en bonne et due forme aux Egyptiens, comme il l'a fait pour les éditeurs de tous les autres pays. Les choses pourront rentrer à ce moment-là dans «l'ordre».

En attendant cette décision salutaire, il faut constater que l'on a, sans raison valable, nui à l'image de l'Algérie. On avait déjà du mal à admettre que des médias basculent dans une forme de hooliganisme et de populisme crétin en créant un climat de haine autour d'un match de foot. On comprend encore moins que des éditeurs, dont la vocation est la défense du livre et la promotion de sa circulation, prennent des décisions aussi inappropriées.

Le match de football Algérie-Egypte est fini. Il y en aura peut-être d'autres, mais en fonction du calendrier fixé par la FAF et la FIFA. Les Egyptiens ont eu un très mauvais comportement en essayant de jouer les prolongations après la défaite de leur équipe au Soudan. Il est déplacé que l'on continue sur des terrains totalement inappropriés à poursuivre, à notre tour, un match qui est bien fini. Alors, encore un effort, monsieur le commissaire... Envoyez donc cette lettre d'invitation et laissez les livres circuler...