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GARE AUX PASSAGERS CLANDESTINS

par M. Saâdoune

Aller vers une parité du gaz avec le pétrole. A défaut de savoir comment y parvenir, les pays membres du Forum des pays exportateurs de gaz (FPEG) ont défini un objectif commun élémentaire : parvenir à un «prix juste» qui maintient la viabilité des investissements.

 Le Forum n'étant pas l'Opep, même si certains le souhaitent, les solutions à court et moyen termes ne sont pas évidentes. La comparaison avec l'Opep n'est en effet pas judicieuse. Quand l'Opep décide de retirer du marché une quantité suffisante de la production, l'effet est garanti pour peu que la discipline interne soit respectée. En dépit des quantités additionnelles que les Nopep peuvent mettre sur le marché, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole a encore les moyens de peser sur les prix. Le Forum des pays exportateurs n'a pas ces moyens d'action. Il n'est pas une organisation capable de retirer d'un marché, non encore globalisé, des quantités suffisamment substantielles pour peser sur les prix.

 Le but immédiat des pays exportateurs ? c'est le résultat annoncé - est de se convaincre de l'impérieuse nécessité d'aller vers une indexation du prix du gaz sur le pétrole. Cette indexation ne fonctionne plus dans les marchés au comptant (spot). A priori, les pays membres du Forum peuvent y parvenir ? ils y ont intérêt - en évitant de se laisser entraîner dans une concurrence entre les livraisons de gaz spot et les contrats à long terme. Tous ont intérêt à préserver la viabilité des contrats à long terme et à éviter que le marché spot ne finisse par les rendre inintéressants pour les pays consommateurs.

 On le constate déjà puisque de nombreux clients ont tendance à ne prélever que les quantités minimales prévues dans les contrats à long terme pour s'approvisionner sur le marché spot.

 Il est clair cependant que les pays exportateurs ont devant eux des années difficiles et qu'ils doivent gérer une période de vaches maigres. La demande en gaz baisse et ne risque pas de reprendre durant les prochaines années. Des problèmes structurels se posent. Et le comportement des membres du Forum pourrait atténuer ou accentuer les difficultés qui se posent actuellement avec un prix du gaz tiré vers le bas, alors que le baril de pétrole a repris de la couleur.

 Et, bien entendu, l'attitude des gros producteurs sera déterminante. La Russie, par exemple, a déjà montré, au moment de l'effondrement des prix pétroliers, qu'elle refusait de s'astreindre à une discipline collective. A juste titre, certains membres de l'Opep l'ont qualifiée de membre clandestin de l'organisation, qui profite des actions de cette dernière sans en avoir les obligations. La Russie peut l'être davantage pour le gaz où elle est, de fait, en concurrence avec d'autres pays ? et notamment l'Algérie ? sur le marché européen. Cependant, et contrairement à l'Opep qui demeure une organisation forte, le Forum des pays exportateurs de gaz risque le naufrage s'il y a trop de passagers clandestins.