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L'Afrique à la peine...

par M. Saâdoune

Si l'économie mondiale montre quelques signes d'amélioration, le continent africain ressent avec de plus en plus d'acuité les effets de la crise. Les indicateurs macro-économiques et les opinions des économistes se rejoignent pour signaler l'arrêt de la récession dans la majeure partie des économies avancées. Bien que très faiblement positifs, les chiffres d'évolution de l'activité sont reçus avec un soulagement certain mais aussi avec une grande prudence.

 Le rebond de l'économie américaine est bien fragile, tant la consommation des ménages est en recul. En Allemagne et en France, le constat est le même : la reprise de l'activité, bien que ténue, est réelle après une très violente contraction en 2008 et au premier semestre 2009. Le retour à la croissance permis par les plans de relance est-il une simple embellie avant une rechute ou annonce-t-il la réinsertion de l'économie mondiale dans un cycle vertueux ? Il est encore trop tôt pour le dire. En tout état de cause, la reprise est loin de gommer les pertes d'emplois causées par la crise mondiale. Le Bureau international du travail (BIT) estime que le nombre de chômeurs augmentera de 60 millions de personnes en 2009 par rapport à 2007. Dans ce chiffre global, l'Afrique comptera quatre millions de chômeurs supplémentaires.

 Certains ministres du Travail et des Affaires sociales du continent, réunis à Addis-Abeba, font assaut de pessimisme et estiment que la tendance risque de s'aggraver. D'une manière générale, les économies africaines, dont les systèmes bancaires, rudimentaires pour l'essentiel, sont faiblement intégrés à l'architecture financière mondiale, n'ont pas immédiatement subi les effets de la crise. Mais le recul de l'activité des principaux partenaires de l'Afrique commence à se faire sentir avec d'autant plus d'acuité que les structures de ces pays sont très fragiles. Il n'existe virtuellement aucune protection sociale et encore moins d'assurance- chômage. La baisse de la demande mondiale de matières premières, conjuguée à la réduction de l'aide au développement, a pour effet premier de diviser par deux ou trois les taux de croissance africains.

 Plus gravement, les économies qui s'étaient tournées vers des productions d'exportation, l'horticulture en étant l'exemple le plus éloquent, se retrouvent dans une impasse, faute de clients. Les experts tablent en effet sur une croissance moyenne de 2%, contre 5 à 6% au cours des périodes précédentes.

 Dans ce sombre tableau, seuls les exportateurs de pétrole sont épargnés : la baisse des prix, si elle a effectivement rogné les excédents commerciaux, n'a pas atteint de seuils critiques. La relative stabilité de l'or noir en temps de crise montre bien que le prix des hydrocarbures connaîtra des évolutions rapides dans l'hypothèse de la reprise.

 Les remèdes appliqués dans les économies développées ne sont pas envisageables, faute de moyens mais aussi en raison de structures économiques fort différentes en Afrique. Le continent n'est pas sans atout cependant : l'accent mis sur le développement de l'agriculture vivrière, au détriment de l'agriculture d'exportation, pourrait contribuer à résorber le chômage et à réduire la dépendance et les risques de famine. Le potentiel existe, il ne manque que l'impulsion politique.