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Trump et la «guerre» commerciale

par Akram Belkaïd, Paris

Donald Trump va-t-il déclencher un conflit commercial généralisé ? En annonçant que les Etats-Unis taxeront bientôt leurs importations d’acier ( 25%) et d’aluminium ( 10%), le président américain n’a pas simplement engendré la panique sur les marchés financiers. Il a provoqué des réactions en chaîne, le plus souvent négatives, à commencer par celles de personnalités du parti républicain, une formation traditionnellement favorable au libre-échange. Certes, on ne sait pas quand ces augmentations tarifaires vont entrer en vigueur. On commence à prendre l’habitude des déclarations tonitruantes du locataire de la Maison-Blanche, lesquelles déclarations sont rarement suivies d’effet. Mais le doute et l’inquiétude sont là.

Représailles commerciales

Si les Etats-Unis taxent l’acier et l’aluminium importé, ils déclencheront des mesures de représailles de la part de la Chine mais aussi de l’Australie et, bien sûr, de l’Union européenne (UE). Cette dernière a déjà laissé entendre que des produits «made in USA» comme les motos Harley-Davidson ou les jeans seraient taxés en retour. Ce à quoi Trump a répondu que son pays réagirait en augmentant les tarifs douaniers sur les voitures européennes. On le voit, le cycle de représailles et de contre-représailles pourrait vite s’emballer.

Dans cette affaire, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sera nécessairement impliquée, ne serait-ce que parce que de nombreux contentieux seront portés devant ses instances. On imagine aussi que les diplomaties des pays concernés vont essayer de trouver un terrain d’entente mais une chose est certaine, Trump vient de donner un sérieux coup de pied au tabou de la mondialisation vertueuse par le biais du commerce international. En affirmant haut et fort ses options protectionnistes, il ne fait pas simplement un appel du pied à ses électeurs alors qu’il évoque déjà sa candidature pour 2020. Trump veut que les Etats-Unis imposent leurs intérêts dans la répartition des flux commerciaux.

Ce n’est donc pas un hasard si, évoquant la hausse des tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium, il a indiqué qu’il pourrait se montrer accommodant à l’égard du Mexique et du Canada… à la condition que ces deux pays se montrent plus souples dans les actuelles renégociations de l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena). Entamées dès son installation à Washington, ces discussions en sont à leur septième round et n’ont rien donné de concret pour le moment. Ottawa comme Mexico ne concèdent rien à leur voisin et Trump aimerait bien que la renégociation aboutisse pour clamer que l’une de ses promesses électorales a été tenue.

Accord dans le Pacifique

Quoi qu’il en soit, il serait faux néanmoins de penser que Trump initie un mouvement de fond en faveur du protectionnisme. Hasard du calendrier, c’est cette semaine que sera signé l’accord de libre-échange transpacifique. Voulu à l’origine par les administrations Bush puis Obama, ce texte libéralise les échanges entre onze pays : Australie, Brunei, Canada, Chili, Japon, Malaisie, Mexique, Nouvelle-Zélande, Singapour et Vietnam.

Les Etats-Unis, eux, se sont retirés de ce projet destiné à contrebalancer l’influence chinoise dans la zone pacifique. Ce faisant, Donald Trump a créé une situation inédite puisque le retrait de son pays crée un vide dont Pékin pourrait bien profiter à moyen terme.