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La folie bitcoin

par Akram Belkaïd, Paris

Le bitcoin, quésaco? Pour celles et ceux qui ne la connaissent pas encore, il s’agit d’une monnaie électronique, cryptée, qui s’échange entre acheteur et vendeur de biens ou de services (bitcoin vient de « bit », l’unité d’information digitale et « coin » qui signifie pièce de monnaie en anglais). Le mécanisme de sa formation demeure complexe à expliquer dans le cadre de cette chronique mais il s’agit de retenir que ce moyen de paiement est le fruit d’une gigantesque œuvre collaborative entre informaticiens, développeurs de logiciels et cryptographes. L’idée de ses créateurs est de contourner les contraintes liées à une monnaie classique émise par un Etat ou une Banque centrale.
 
Une monnaie codifiée
 
Les prémisses du bitcoin remontent au début des années 2000. Du développement d’Internet naît l’idée d’une monnaie 100% électronique, ne dépendant d’aucune contrepartie physique (comme un stock d’or) et qui serait générée par une communauté d’ordinateurs permettant à la fois de tracer l’origine de chaque unité de compte et donc d’en empêcher la falsification ou la contrefaçon. Le bitcoin est né à la fin des années 2000 et il a longtemps été peu connu du grand public. Aujourd’hui, on peut affirmer sans peine qu’il est l’une des vedettes de la sphère financière.

Pour le comprendre, il faut savoir qu’un bitcoin valait 1.000 dollars au début de l’année et qu’il en vaut aujourd’hui 11.000 dollars (sa valeur est fixée par la confrontation de l’offre et de la demande). Du coup, tout le monde s’intéresse à cette monnaie. Les Etats et les régulateurs surtout. Ces derniers s’inquiètent de l’existence d’un moyen d’échange qui se veut concurrent des circuits financiers classiques (ne serait-ce que parce que les frais de transaction sont quasiment nuls). Depuis plusieurs années, Banques centrales et autres organismes de surveillance multiplient les mises en garde et avertissent les utilisateurs du bitcoin contre les risques liés à son usage. Des critiques balayées par la communauté « bitcoin » qui y voit une volonté de maintenir l’actuel système financier et empêcher l’émergence de nouvelles solutions monétaires.

Les critiques contre le bitcoin citent régulièrement le fait que cette monnaie serait très recherchée par le crime organisé qui y aurait trouvé le moyen idéal de blanchir son argent dans l’anonymat le plus complet. On cite, par exemple, le cas de pirates qui exigent des paiements en bitcoins pour débloquer le système informatique d’une grande entreprise ou l’appareil d’un simple particulier. S’il est évident qu’une partie des détenteurs de cette monnaie sont soucieux de discrétion, il est tout aussi clair que ses usages se retrouvent aussi dans des secteurs parfaitement légaux.

La prévention des autorités mais aussi de l’industrie financière classique -on pense aux banques d’affaires- se comprend aisément. Le bitcoin échappe à toute régulation étatique, voire à tous les moyens classiques de gestion monétaire. Pas de planche à billets, pas de retrait de coupures usagées, pas de limitation des montants échangés… Certains pays interdisent déjà ou tentent de limiter l’usage du bitcoin mais ne peuvent l’empêcher hors de leurs frontières.

Bulle spéculative
 
Reste que cet essor est trop important et trop rapide pour ne pas ressembler à une bulle spéculative. Nombre d’acheteurs de bitcoin ne le voient que comme un placement et ne comprennent pas toujours les mécanismes de son fonctionnement. Des économistes s’interrogent même sur la nature délictuelle de cette monnaie, estimant qu’il pourrait s’agir d’une escroquerie de grande ampleur. En tout état de cause, les arbres ne montant jamais au ciel, il n’est pas exclu que la valeur de cette monnaie reflue un jour. Reste à savoir quand et avec quelle ampleur.