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Les mains

par El-Guellil

Un petit gamin qui passe de personne en personne dans le bus, tendant la main et marmonnant une prière approximative «rani jiaan yal moumnine» dont on a l'impression qu'il ne comprend absolument pas ce qu'il dit. Un petit bonhomme comme ça d'une dizaine d'années, qui parle faiblement, qui a l'air de tenir à peine sur ses jambes, s'accrochant aux sièges... ça attriste et ça apitoie. Ça donne envie de faire un effort, un geste.

Même si on a déjà donné à la dame qui est passée juste avant, quand à l'arrêt on attendait el car, en expliquant qu'elle s'était retrouvée à la rue suite à... (une histoire à l'algérienne) qu'il lui manquait pour acheter les médicaments d'une ordonnance qu'elle présente. Alors on farfouille et puis on se rend compte qu'on n'a plus de monnaie, tant pis, ce sera pour une autre fois, on se sent coupable d'avoir acheté le pain l'autre jour en se débarrassant de sa monnaie plutôt qu'en utilisant un gros billet. Et puis plus tard, on descend du bus, et on voit le gamin tout faible qui, oh miracle, se met à courir vers deux adultes entourés par d'autres enfants et en leur tendant sa collecte assez conséquente. Et on se dit que vraiment c'est facile de profiter de la crédulité des gens !

Et pour couronner le tout, le lendemain, rebelote, la même femme, et, comme par hasard, il lui manque exactement la même somme pour s'acheter les mêmes médicaments... le même gosse qui a retrouvé sa faiblesse. Qui redescendra au même arrêt. Les receveurs le connaissent, il y en a qui lui refusent l'accès au bus. D'autres semblent l'attendre. «C'est la misère qui le pousse à faire ce qu'il fait. Allah yastor... vous croyez que ses parents sont heureux de voir leur enfant tendre la main... denia bent el mekki, des fois, elle fait rire mais souvent tbeki.»