Malgré la médecine gratuite, malgré les mesures du
gouvernement en matière de santé, tomber malade revient de plus en plus cher à
l'Algérien moyen. Il faut dire aussi que les structures de santé étatiques ne
répondent plus à la demande trop forte des malades qui les investissent du
matin au soir, faisant régner les passe-droits et les connaissances. Tout a été
dit concernant la femme de ménage qui fait la loi ou l'agent de sécurité qui
règne en maitre absolu des lieux ou l'obligation faite aux malades de ramener
une seringue pour se faire piquer ou du fil chirurgical et plein d'autres
choses encore que nous devrions trouver sur place et qui sont détournées.
Devant tout cela, le pauvre malade évite souvent de se rendre à l'hôpital ou au
centre de santé et se dirige donc vers le privé où il doit aussi faire preuve
de patience car la demande est vraiment forte. Pour les médecins généralistes
qui sont assez nombreux, cela peut aller puisqu'il ne faut attendre qu'une
toute petite heure, mais il faut quand même payer entre 600 et 1000 DA la
consultation, des honoraires fixés souvent selon la notoriété du médecin, chose
qui se fait aussi pour le médecin spécialiste. Pour ce dernier, il faut déjà se
lever tôt pour aller s'inscrire généralement vers 6 heures du matin, sans être
sûr de passer en temps voulu car il y a aussi les parents, les amis et les
autres. Là, il faut y être vers 7 h du matin et attendre dans des salles
d'attente combles, le tour n'intervenant parfois que vers 16 ou 17 heures avec
de la chance. Des patients nous ont affirmé être restés de six heures du matin
jusqu'à 22 heures pour passer et «balayer la salle» (être le dernier). Ce ne
sont heureusement pas tous les spécialistes qui sont dans ce cas mais c'est le
cas pour la plupart. Une fois chez le médecin, il y a la consultation qui coûte
entre 1.500 et 2.000 DA puis les radiologies faites sur place (ECG, Rayons X,
échographie,?) et le malade débourse au moins 4.000 DA dans le meilleur des
cas. Il sort avec une ordonnance pleine et se dirige directement chez le
pharmacien juste à côté où, un grand merci à la carte CHIFA, il débourse encore
entre 1.200 et 2.500 DA s'il n'y a aucun médicament non remboursable. Outre
l'ordonnance, le malade a aussi, très souvent une demande d'analyses médicales
et de radiologies assez longue, et le lendemain, il se dirige, à jeun, vers les
laboratoires qui poussent comme des champignons un peu partout. Là, c'est le
coup de massue car, depuis quelques mois, tout a augmenté. Avant même de
procéder aux prélèvements divers, l'employée, face à son pupitre, donne le prix
qu'il faut payer : 3.000 DA pour celui-ci, 7.000 DA pour le suivant, 10.000 DA
pour l'autre et jusqu'à 20.000 DA ou plus pour certains. Le pauvre malade hoche
la tête, les yeux dans le vide et répond mécaniquement que oui, il est assuré
mais son cerveau lui dit : «cela sert à quoi d'être assuré ? Tu auras moins que
des miettes, pour 5.000 DA tu n'as droit qu'à 20 ou 30 DA de remboursement».
Mais comme la santé n'a pas de prix, souvent nous payons en rechignant mais
nous payons quand même. Là, la question se pose déjà pour le médecin qui prend
entre 1.500 et 2.500 DA pour une consultation alors que la base est de 100 DA
pour le remboursement (spécialiste). Pour les analyses médicales et les
radiologies, les prix sont déjà trop élevés et personne ne connaît le taux de
remboursement surtout que ce sont par des signes cabalistiques que sont
désignées les différentes prestations. Le pauvre assuré se sent arnaqué sur
tous les plans et, ne sachant que faire, abdique et se dit : «pourvu que je
guérisse !».
Maintenant, il s'agit de trouver une solution qui
soit juste, ou bien obliger les médecins et les laboratoires à pratiquer des
prix administrés même s'il faut les ajuster par rapport aux prix actuels. Il
semble d'ailleurs que ce serait la solution idéale, car il est hors de question
de les laisser libres et d'obliger la CNAS à rembourser selon les prix
pratiqués. Il y a un adage bien de chez nous qui dit : «il ne faut léser ni le
berger ni le chacal», pourquoi ne pas le mettre en application, tout le monde y
gagnerait ?