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LE POUVOIR ET SES ERRANCES

par Belkacem Ahcene-Djaballah

Livres

Algérie. Dire et pouvoir ou la quête de la citoyenneté. Recueil de chroniques de Youcef Merahi (préface d'Amin Zaoui). Tafat Editions, Alger 2018, 155 pages, 500 dinars.



Une quarantaine de textes (en fait, il me semble que ce sont des chroniques déjà publiées dans la presse... et on aurait aimé les dates des parutions pour nous permettre de mieux resituer les évènements et/ou les états d'âme décrits).

Une quarantaine de textes où tout y passe : la gouvernance du pays, les comportements des citoyens, le cinquième mandat à l'horizon, les partis politiques, le système éducatif, le financement non conventionnel, la harga, l'exil, les élections préfabriquées, le FLN, le 5e mandat, les mauvaises nouvelles...

Des faits, des événements, des comportements et des réactions présentés dans le plus pur style du journaliste-chroniqueur : précis, concis tout en étant "léger" avec une pointe d'humour qui arrive à faire "passer" le message. Tout cela, souvent sinon toujours, retrouvé dans le même texte. On s'y perd de temps en temps mais pas toujours.

C'est là tout l'art du chroniqueur..., cultivé qui plus est ! Vous faire traverser très rapidement (si vous êtes un bon lecteur qui veut en avoir pour son argent) une courte période de votre existence qui vous paraissait relativement "vide" et vous faire découvrir sa richesse..., en tout cas, au minimum, quantitative : c'est alors que vous vous apercevez que ce que vous croyiez relatif et insignifiant était, en fait, très important dans votre vie, dans celle des citoyens, du pays et du monde.

Il est vrai que, prises une à une, les chroniques apparaissent dans leur solitude éditoriale de bien peu d'importance. Mais, réunies en un seul gros volume, elles acquièrent une autre dimension. Littéraire, d'un côté, mais surtout cela permet de découvrir du talent (presque toujours) et du génie (parfois). Les exemples sont nombreux : Kamel Daoud, Rachid Mimouni, Rachid Boudjedra et bien d'autres, certes moins connus mais tout aussi importants... aux yeux de ceux qui les lisent.

Youcef Merahi, grand lecteur devant l'Éternel, grand observateur de la société, curieux comme pas un..., "écrit par ses yeux" car "il a le flair du regard" (A. Zaoui).

L'Auteur : Né en 1952 à Tizi Ouzou, diplômé de l'ENA, ancien SG du Haut-Commissariat à l'amazighité, poète, écrivain, critique littéraire et chroniqueur de presse. Auteur de plusieurs ouvrages dont "Je brûlerai la mer". "Un mordu de livres" !

Extraits : "Les conférences de presse ont un goût d'amertume dans notre pays; elles sont la voie privilégiée pour tomber à bras raccourcis sur l'adversaire du moment" (p 76). "Personne ne cherche à comprendre pourquoi nous voulons tous embarquer vers cet Ailleurs mirifique. Je dis "tous" parce que nous voulons tous abandonner le navire Algérie. Ceux qui ont les moyens sont déjà là-bas, qui à Neuilly, qui dans une banlieue parisienne. Et Saadani (note : alors SG du FLN) vient dicter, par conférence interposée, ses velléités patriotiques. Il n'est pas le seul, malheureusement" (p 77). "Qu'il n'y ait pas de cinquième mandat serait la naissance de la deuxième république. Là, c'est un événement historique. Monumental" (p 105). "Mais que vient faire la dawla, que diable, dans nos crachats, notre morve, nos mégots, notre chique (et tout le reste) qui constellent nos trottoirs ? On ne décrète pas la propreté, ni le civisme ni le vivre ensemble" (p 111). "Il faut au peuple algérien, un jour, qu'il affronte ses démons ! Puis quel est donc ce peuple qui ne chante plus son pays ?" (p 111).

Avis : Une plaidoirie politico-sociologique..., un livre poétique" (Amin Zaoui, préface). Des chroniques du vrai réel !

Citations : "Avec l'arrivée de notre Président (Bouteflika), la décennie a changé de couleur. De noire qu'elle était, la décennie a blanchi. Notre pays, l'Algérie, est dans la décennie blanche" (p 10). "Un rien déclenche la fureur d'un Algérien. A croire que la nitroglycérine coule dans nos veines. Et le vendredi, nous nous retrouvons à la mosquée du coin pour écouter l'imam qui, à mon sens, prêche dans le désert. Car une fois le seuil de la mosquée franchi, "les atavismes se régénèrent" (p 41). "Quand un peuple cesse de respirer dans son pays, il est fatalement tenté d'aller voir ailleurs" (p 52). "Tout est possible chez nous, sauf l'impossible qui ne l'est pas" (p 65). "Quand la culture fait défaut, la société est décérébrée" (p 149).



Chadli Bendjedid. Mémoires. Tome 1 : 1929-1979 Rédigé par Abdelaziz Boubakir et traduit de l'arabe par Mehenna Hamadouche. Casbah Editions. Alger 2011. 332 pages, 1.000 dinars (Pour se souvenir !)



Le 3ème Président de l'Algérie indépendante (comme ils disent) aura finalement réussi aussi bien ses entrées que ses sorties dans le monde politique, en ce sens que l'on se souviendra de lui bien plus longtemps qu'on ne le croit. Beaucoup de chance? Daa'oui El Kheir, comme diraient certains. Et, lui-même, à travers certaines de ses confidences, semble y croire assez fortement. Ce qui donne un soldat résolument engagé dans son combat dès sa prime jeunesse?, soldat discipliné, fidèle et toujours prêt à être un " médiateur ". Ce qui donne un fond de religiosité (bien simple comme celle de nos pères, comme au bon vieux temps) et de légère superstition (croyance en une bonne étoile qui n'a rien à voir avec les amulettes et les b'khour des zaouïate), qui nous amène à mieux comprendre le personnage -social, sensible et sociable, " sentimental " même, selon Boumediene dont il se disait très proche malgré certaines divergences de fond- et, l'âge venant, ce qui permet de mieux saisir ses réactions face aux clameurs des foules de la fin des années 80.

Bien sûr, tout ce qui est rapporté est intéressant à plus d'un titre même si, parfois, il y a un surplus de détails qui noient l'essentiel? mais, c'est là le défaut de tous nos moudjahidine qui aiment, certainement pour se différencier les uns des autres, insister non sur leurs fortunes ou leurs misères actuelles (qui peut laisser planer des doutes sur leurs origines, surtout les premières), mais sur leurs combats et leurs souffrances passés sur le terrain, vrais ou revus et corrigés. Bien sûr, il est intéressant de voir notre héros " tordre le cou " à certaines rumeurs comme celles qui faisaient croire qu'il a été, aussi, avant de rejoindre le maquis, soldat de l'Armée française. Bien sûr, il est intéressant de savoir que Chadli n'a jamais fait de prison coloniale? mais qu'il a été un des premiers prisonniers de l'Algérie indépendante : plus d'un mois au secret dans un " trou à rats ". Puis, par la suite, devenu Président, pas rancunier pour un sou à l'endroit de ses geôliers.

Un bel exemple qui fait pardonner toutes les faiblesses et les (quelques) ratages. D'autant que le Monsieur ne manque pas, ici, de faire part, de manière claire ou discrète, de ses regrets. On le sent bien derrière les mots, comme la condamnation à mort de Chabani. Bien sûr, il ne manque pas de dire clairement ce qu'il pense de certains guerriers ou politiciens, dont Ahmed Ben Bella qu'il compare à ce chef fatimide qui a tout fait pour exterminer sa tribu qui lui avait pourtant pavé le chemin du pouvoir. Mais, l'important, pour nous, c'est moins de connaître le parcours, assez riche? et bien enviable de l'homme, que de voir, enfin, un homme politique, qui en a vu de toutes les couleurs dans sa jeunesse de maquisard, qui a occupé des fonctions supérieures dans le pays, jusqu'à celle suprême de président de la République durant bien longtemps, et qui va jusqu'au bout de sa responsabilité? en se confiant, en fin de vie, au peuple qu'il a dirigé, aimé ou "mal-mené".

Le premier Président ne l'a pas fait. Sans doute, il n'avait que faire de l'opinion de gens qui ne l'ont pas soutenu le 19 juin 1965, puis qui ne l'ont pas accueilli triomphalement en septembre 90. Le second, mort sans qu'il ne s'y attendait, ne l'aurait certainement jamais fait. Le troisième n'a pas eu le temps d'y penser, certains s'étant chargés d'écrire pour lui le mot "fin". Le quatrième a déjà tout "dit" en réglant des comptes. On attend avec impatience les mémoires du cinquième. Quant au sixième Président de l'Algérie indépendante, peut-être est-il en train de les préparer ? Qui sait !

Avis : A ne rater sous aucun prétexte quelle que soit votre opinion sur Chadli. Un livre écrit de manière simple mais forte?, rythmé grâce au souci du détail? et des récits diversifiés? avec, parfois, bien des révélations, certes toujours intéressantes mais qui ne vont pas jusqu'au bout de la vérité (exemple de la répression après le coup d'Etat du 19 juin menée, dit-on, personnellement par le chef militaire du coin -Ataïlia, "Errougi"- et qui avait fait des dizaines de morts à Annaba). On y sent une émotion sincère pour tout ce qui est évoqué. On aurait pu le titrer : les mille et une aventures de Chadli. On attend avec impatience le deuxième tome. Les mille et une mésaventures ?

Phrases à méditer :

- "L'être humain planifie et le sort le nargue".

- "Ils (les combattants) avaient été réunis par la guerre et la politique et séparés par les aspirations et les appétits".

AU FIL DES JOURS ACTUALITES :

Samedi 7 septembre 2019 :

- 76ème Mostra de Venise (cinéma) : le prix de la Meilleure interprète féminine a couronné Ariane Ascaride dans "Gloria Mundi", ce qui récompense aussi le travail de longue haleine et d'une grande cohérence de son mari, le réalisateur Robert Guédiguian (cette fois, il s'en prend aux dégâts de la mondialisation au sein d'une famille de la classe moyenne marseillaise, son terrain de prédilection). Issue d'une famille d'immigrés italiens, venue en France pour "fuir la misère", Ariane Ascaride, au nom de son histoire personnelle, a fait l'éloge de l'immigration, dédiant son prix, dans le pays de Roberto Salvini, à "ceux qui vivent pour l'éternité au fond de la Méditerranée" ?Ariane, félicitations et respect !

Lundi 9 septembre 2019 :

- Depuis quelques années, notamment après le printemps arabe en 2011, qui a éclaté en Tunisie, le paysage audiovisuel tunisien s'est illustré par la qualité de ses chaînes et surtout par la diversité de ses programmes, et tout cela grâce à la formation acquise à travers les différents instituts et écoles de cinéma et audiovisuel privés et publics qui ont été créés depuis quelques années en Tunisie. On a même vu plus de 150 techniciens venir pour travailler dans le champ audiovisuel algérien en tant que technicien. Aujourd'hui, plusieurs producteurs et directeurs de chaînes algériennes, publiques et privées, vont en Tunisie pour produire leurs programmes. La fameuse émission Akher Kalima, était enregistrée dans un studio dans la banlieue de Tunis, par l'équipe de Nabil Karoui pour le compte de l'opérateur algérien Nedjma, dont il était le publicitaire. L'audiovisuel en Tunisie était devenu une entreprise rentable, ce qui faisait travailler des centaines de personnes et la télévision publique tunisienne n'a plus de monopole des programmes de télévision. Ainsi depuis quelques années, la Tunisie possède des télévisions aux programmes de qualité qui concurrencent les chaînes libanaises, syriennes ou encore égyptiennes. A côté de cela, la puissance de la télévision publique ex-RTT (Radio télévision tunisienne) est restée intacte.

Le coup d'éclat est venu avec le déroulement, unique dans le monde arabe, dans les studios de la télévision publique du premier débat télévisé, animé par différents candidats dans une présidentielle tunisienne pluraliste.

Il est vrai que la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica) et de l'Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie), ainsi que des représentants du comité d'éthique du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) ont joué et jouent un rôle important.

L'émission a été diffusée en simultané par d'autres chaînes, grâce à la télévision tunisienne qui a mis à leur disposition le signal de diffusion "clean feed".

Une première expérience réussie et devenue un exemple à suivre.

Mercredi 11 septembre 2019 :

Le pli est pris et il paraît difficile de se sortir du guêpier populiste encouragé par le régime Bouteflika pour s'attirer les bonnes grâces et les bulletins de vote. Voilà donc que la Diaspora des Algériens résidant à l'étranger (DARE) pond un communiqué dans lequel elle évoque la situation des Algériens "coincés" à Alger, après la faillite d'Aigle Azur et demandant à l'Etat algérien de faire un "geste" à leur égard. "Quel paradoxe ! Des prix exorbitants (Air Algérie ?). Des places limitées (Air Algérie ?) et souvent les appareils partent à moitié vides (Air Algérie ?) Depuis bien longtemps, les Algériens vivent des galères chaque été, lors des congrès (sic !) ", commence par rappeler la DARE.

Puis de revenir à la situation actuelle des passagers laissés en rade pour dire : " Des milliers de citoyens, clients d'Aigle Azur, se retrouvent bloqués dans les aéroports aussi bien algériens que français faute d'avions. Voici une compagnie aérienne de droit français créée par un Algérien qui est cédée lors de la mort du fondateur à des Chinois et se retrouve aujourd'hui en faillite. 2ème compagnie française après Air France KLM. 50% du marché intérieur algérien".

Et de préciser encore que "11.000 familles sont livrées à elles-mêmes. Air Algérie prévoit d'absorber 20%, ce qui est insuffisant. La plupart ont des enfants scolarisés, n'ayant pu faire leur rentrée". Puis, la comparaison qui veut "tuer" : "Pour la seconde fois dans un passé récent, les autorités algériennes ont affrété des avions spéciaux pour les matchs des Fennecs, après le Soudan, il y a eu l'Egypte. Pourquoi ne pas renouveler l'opération pour les clients...". C'est la raison pour laquelle "la diaspora attend avec impatience un geste de l'Etat algérien. Air Algérie a un devoir moral vis-à-vis de sa communauté établie à l'étranger. C'est de sa responsabilité d'entrer dans le capital de la compagnie (re-sic !). Elle ne doit pas renoncer et laisser la place à d'autres repreneurs, le futur d'Aigle Azur, avec ses destinations, ses créneaux ainsi que ses infrastructures aéroportuaires seraient un atout majeur pour la compagnie nationale". Purement et simplement du chantage en faisant appel à la "fibre" de la solidarité. Monsieur Arezki Idjerouidène (Paix à son âme) avait fait le geste immense d'investir son argent... Pourquoi, donc, les membres de la diaspora parmi les plus fortunés ne se regrouperaient-ils pas et deviennent actionnaires ? D'une pierre plusieurs coups ! Avec les sous des autres si possible !

CITATIONS ALGERIENNES :

- Après l'indépendance, la vision des oulémas a servi à "nationaliser" les Algériens. Loin de favoriser l'assimilation des populations, elle l'a entravée. Le refus de prendre en considération toutes les étapes culturelles qui ont concouru à la formation de l'Algérie est à l'origine du caractère schizophrénique de "l'identité" algérienne (Mohammed Harbi, "L'Algérie et son destin. Croyants ou citoyens". Essai © Médias Associés, 1994)

- On ne construit pas un pays avec des mots, des slogans, des bobards ou des critiques stériles. On ne bâtit pas le socialisme par le verbe. On ne bâtit pas non plus sa maison en commençant par la toiture, mais par les fondations. Or, la construction d'un pays et de l'avenir d'un peuple ne reposent que sur son économie. L'indépendance économique est la seule garantie véritable de l'indépendance politique (Farès Abderrahmane, "La cruelle vérité. Mémoires politiques 1945-1965" © Casbah Editions, Alger 2006)

- La cassure de 1962 constitue le point de départ des chocs, des angoisses et des difficultés d'un peuple qui ne comprenait plus son présent et qui, pis encore, doutait de son avenir (Kiouane Abderrahmane, " Moments du Mouvement national. Textes et positions". Récit © Editions Dahlab, Alger 2009)

ARCHIVES BRÛLANTES :

Jeudi 8 septembre 2011 :

- La presse continue de publier des extraits des "révélations" de Wikileaks. "Quand Bouteflika défend El Gueddafi, Bachar Al Assad et les Al Saoud" (câble de l'ambassade US à Alger, 21 août 2005).

"Le pouvoir en Algérie est une affaire de famille "(note de novembre 2008). Il rapporte les propos du directeur général de Citibank Algérie : "Avec toujours les mêmes familles au pouvoir, comment voulez-vous qu'il y ait un changement ?"? et de citer le cas de Karim Djoudi, ministre des Finances, fils d'un ancien puissant diplomate (Hocine Djoudi).

"Le système électoral fait pour favoriser Bouteflika lors des présidentielles 2009" (câble de David Pearce).

- Article publié par le site électronique DNA, par Farid Alilat (extraits) : "Un président de la République originaire de Tlemcen, près de la moitié de ses ministres issus de la même région, une flopée de conseillers, de hauts responsables civils et militaires nommés en raison de leurs origines tlemcéniennes et enfin la ville de Tlemcen qui bénéficie de 10 milliards de dollars en projets, le cœur du pouvoir algérien se situe désormais à l'Ouest.

Au moins deux câbles de l'ambassade américaine à Alger, mis en ligne par le site Wikileaks, évoquent cette tribalisation du pouvoir au profit d'une caste de responsables issus d'une seule région d'Algérie : Tlemcen.

Depuis qu'Abdelaziz Bouteflika, aujourd'hui âgé de 74 ans, est devenu président en 1999, le centre de gravité au sein du pouvoir s'est progressivement déplacé vers l'Ouest, écrit un mémo US en date du 12 septembre 2008.

"Bouteflika est lui-même originaire de l'Ouest, 12 des 34 ministres viennent de Tlemcen ou de wilayas limitrophes, et une majorité de conseillers de Bouteflika proviennent de Tlemcen ou de sa ville natale -officielle- Nedroma", rapporte ce câble.

Pour les diplomates américains, le point culminant de l'emprise des hommes de l'Ouest est la désignation en 2011 de Tlemcen "capitale de la culture islamique ", initiative pilotée par la ministre de la Culture Khalida Toumi, originaire de Kabylie mais totalement inféodée au clan présidentiel.

Pourquoi Tlemcen ?

Le sociologue Daho Djerbal affirme aux Américains que les mérites relatifs de l'héritage islamique de Tlemcen ne justifient pas son choix comme capitale islamique. "Constantine, considère-t-il, est le centre de l'islam en Algérie. Elle est le berceau des oulémas et fut un temps capitale du Maghreb et rivale de Rome".

"L'héritage islamique de Tlemcen est modeste, ajoute-t-il. Son statut de capitale d'un petit royaume entre le 12e et le 15e siècles lui confère davantage un crédit historique qu'islamique".

La désignation de Tlemcen comme capitale de la culture islamique aurait pu être anecdotique si cette région n'avait pas bénéficié d'un traitement particulier de la part du pouvoir central.

Plus que toute autre wilaya d'Algérie qui en compte 48, Tlemcen aura bénéficié d'une enveloppe de 10 milliards de dollars en projets d'infrastructures au cours des douze dernières années.

En comparaison, cette enveloppe équivaut presque le montant du projet de la grande autoroute qui devrait relier l'ouest à l'est d'Algérie.

Tlemcen, une ville plus que choyée

Au cours d'une visite effectuée par des diplomates américains à Tlemcen en 2008, visite dont le compte-rendu est largement rapporté dans un câble daté du 9 décembre 2008, un official algérien leur révèle que le wali supervise des projets dont les dépenses culminent à 10 milliards de dollars.

Aéroport, téléphérique, routes, hôtels, bâtiments administratifs, campus, logements, c'est une nouvelle ville, moderne, qui émerge à Tlemcen et autour de sa périphérie.

Si les pouvoirs publics ont généreusement arrosé Tlemcen, il semble que cette manne providentielle n'a pas contribué à faire de cette ville un pôle économique. "A l'ombre de ces grands projets publics, le climat socioéconomique à Tlemcen semble stagner et souffre du même manque de dynamisme constaté ailleurs dans le pays", note le document de l'ambassade américaine.

Peu importe. L'essentiel est de faire de Tlemcen et des ses hommes le cœur du pouvoir en Algérie.