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Le cadenas pour et contre Moad Bouchareb

par El Yazid Dib

Le cadenas n'est pas un engin machinal de fermeture. Il ouvre aussi des portes à bien d'autres. C'est bel et bien par ce cadenas que Bouchareb est devenu ce qu'il est. Les faits, les scènes, les films sont là. L'histoire aussi. Cependant ce cadenas, à défaut d'un mécanisme adéquat ou d'un automatisme légal d'accès, ne s'inscrit que dans le provisoire. Si l'on dit habituellement que c'est le provisoire qui dure, en politique c'est cette durée qui est provisoire. Les mêmes «cadenasseurs», selon un journal en ligne, s'apprêteraient à le «lui mettre sous le cou». Ils lui auraient reproché un travail fractionnaire, une tête qui prend des airs et un goût vers l'esprit du club privé. Ses amis.

Il semblait bien en avoir beaucoup avant qu'il n'accède aux envoûtements du perchoir. Il en a rajouté des dizaines depuis pour élaguer d'autres centaines qu'il scrutait inutiles, inopérants et sans objet. A Sétif, sa toile serait rétrécie comme une peau de chagrin. Bien plus égal à lui-même, car surpassant sa nature, bon enfant, digne fils de moudjahid ; il n'arriverait tout de même pas, tel que me racontait un vieux de la vieille garde partisane locale, d'avoir les gènes matriciels des hommes de Sétif, ne se fiant qu'à des carriéristes et des applaudisseurs du chef de l'instant. La désignation malhabile et d'autorité, décidée extra-parti, d'un candidat aux sénatoriales à contrario du résultat flagrant des primaires, était sa première preuve de force. Exhumer des cadavres politiques, réanimer un feu éteint et vouloir sacraliser un endormi sénateur qui n'avait même pas pu se faire classer confortablement dans une liste communale, ce n'est que de la prise de revanche sur un temps mal aimé. Bon bref.

Donc l'opinion nationale qui s'en fout de cette instance dirigeante, contrairement à ces opportuniste, hypocrites et mercenaires, est en attente d'un repositionnement pour un éventuel retour à ce qui se dit être légal. Le congrès.

A ce stade de responsabilité, avoir entre ses mains la destinée de la plus grande machine politique du pays requiert du grand tempérament. Nous sommes encore loin de cette phase où ce parti puisse être géré par un jeune. Bouchareb semble se redécouvrir dans un univers qu'il comptait bien comprendre. Peut-être, s'est-il un temps soit peu aguerri aux luttes locales, mais celles qui se passent au sommet n'ont pas les identiques couleurs. Ça se passerait en dehors de toute volonté, loin de toute valeur idéologique. Avoir en face, en mode de concertation un Salah Goudjil, un Belkhadem, un Belayat, l'on ne peut que les écouter. Pas un mot à dire. Ces gens-là ne sont pas dans le parti ; ils sont le parti. Alors, se contenter d'en endosser l'habit d'un simple administrateur de routine ne doit pas donner le tournis ou se dire que l'on est déjà dans les pages dorées de l'histoire. Les «6» historiques vous observent et il n'y aura jamais ni de sept, huit ou de suivants. L'histoire grandiose s'est fermée, sans nul cadenas et s'ouvre à nouveau par un cadenas. La vôtre s'est dejà enregistrée. Elle peut toutefois connaître des tournants bienveillants et salvateurs. A vous de bien rejouer.

L'on ne blâme jamais un bébé dans son apprentissage à l'effort de marcher, de faire ses premiers pas. L'on doit l'aider, ce qui est du devoir naturel de ses parents biologiques ou adoptifs. Beaucoup d'éléments sont à sa décharge. Il offre une beauté faciale et manie morphologiquement bien le verbe et toute sa syntaxe. Il n'en manque que l'accord des temps et des genres. S'il subit l'impératif et le conditionnel, il croit savoir puiser ses grammaires du passé décomposé. Ya Rayess, fini le temps de la conjugaison uniquement à la première personne du singulier. C'est la démocratie, fut-elle façadière qui impose le «nous». Le cadenas n'était-il pas une affaire de «tous», de «vous» ? Bonne année.