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Le poids de la crise politique

par Mahdi Boukhalfa

Le gouvernement, qui tente de faire une rentrée sociale pas trop médiatisée, sinon sur la pointe des pieds devant une détérioration générale des fondamentaux économiques et une situation déplorable sur le front sanitaire avec cette épidémie de choléra, est devant de lourds défis: assurer le fonctionnement serein des institutions de l'Etat, une bonne rentrée des «classes» et, surtout, une élection présidentielle déjà chahutée par l'opposition. Il y a lieu de noter dans ces circonstances particulières que l'état de santé du président Bouteflika, qui s'est rendu la semaine dernière à Genève, reste un sujet préoccupant pour l'opinion publique. Mais surtout pour les partis politiques qui ont dénoncé les tentatives des partis du pouvoir d'organiser un «5ème» mandat, c'est-à-dire repousser aux calendes grecques l'alternance au pouvoir.

C'est face à cette situation politique que le FFS vient de nouveau revendiquer la mise en place d'une assemblée constituante comme un premier pas vers la normalisation et la crédibilité des institutions politiques du pays et leur arrimage à la démocratie, la bonne gouvernance, l'égalité sociale et des chances dans une Algérie en proie au doute depuis la chute des cours du brut en 2014. C'est dans ses habits de militant du changement que le FFS vient de revendiquer durant son université d'été la mise en place d'une assemblée constituante pour enterrer l'immobilisme politique qui assure une légitimité usurpée à certains partis proches du pouvoir. Et le parti de feu Hocine Aït Ahmed le revendique lorsqu'il déclare qu'il «militera pacifiquement pour une assemblée constituante souveraine par opposition à l'immobilisme institutionnel et pour mettre fin à la persistance de la crise de légitimité».

Même revendication du côté du Parti des travailleurs, sa SG, Louisa Hanoune, ayant décliné autant l'initiative à laquelle avait appelé Abderrezak Mokri que celle de se retrouver embrigadée dans des aventures politiques sans lendemain. Car, pour elle, le plus morbide dans la situation politique actuelle dans le pays est cette incapacité, sinon une improbable possibilité pour les partis de l'opposition de faire un front commun contre les partis au pouvoir qui tiennent en otage les Algériens. Le cri de désespoir de Louisa Hanoune quand elle accuse le gouvernement d'exacerber les conditions de vie des Algériens, avec une chute de 60% du pouvoir d'achat depuis 2014 «à cause de lois de finances antisociales et antinationales», ne peut être dissous dans les positions démagogiques avec très peu d'emprise sur la réalité sociale des Algériens des deux principaux partis du pouvoir le FLN et le RND. Car ces deux partis, et en dépit de l'état de santé du président Bouteflika, n'ont pas hésité à l'accabler en lui demandant de se présenter pour un 5ème mandat.

Une requête qui a pris des dimensions irréelles par rapport aux dures conditions de vie des Algériens, mais surtout vis-à-vis des attentes de la classe politique qui, elle, désespère qu'il n'y ait jamais la moindre ou la plus petite occasion de débloquer une nouvelle ère politique, d'ouvrir une fenêtre sur un avenir possible, moins stressant, plus rassembleur. Avec moins de partis «du président», mais plus de parties favorables à une alternance politique où les Algériens comme leurs leaders politiques, de quelque obédience qu'ils soient, se reconnaissent et défendent. A ce moment-là, le fardeau de la crise économique sera moins lourd pour tous.