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En Algérie, les trains n'arrivent pas à l'heure mais ils arrivent quand même

par Amine Bouali

À Tlemcen, deux faits, peut-être ordinaires mais qui prouvent que nous ne vivons pas dans une anarchie totale et que tout n'est pas gangrené dans notre pays, ont été récemment portés à notre connaissance ou se sont déroulés devant nos yeux, devenus presque incrédules par «la force d'autodestruction» de la sinistrose et de la méfiance généralisées.

D'abord, ce mardi 14 août, l'information a circulé en ville que les voyous criminels qui avaient pris en otage, il y'a environ un mois, à Tlemcen, une vieille femme chez elle et l'ont torturée pour lui extorquer son argent, ont été appréhendés par les services de police. L'affaire avait fait alors grand bruit et avait donné le sentiment aux habitants que ni leur vie ni leurs biens n'étaient en sécurité.

Ensuite, ce même mardi 14 août, au centre-ville de la capitale des Zianides, sous une chaleur torride, s'est déroulé le fait suivant, un événement banal, somme toute. Une femme fut prise d'un malaise et sans aucune hésitation, des citoyens lui prêtèrent une main secourable. Dix minutes plus tard, les sapeurs pompiers arrivèrent sur place, prévenus par un témoin, et emmenèrent la dame soufrante à l'hôpital.

Quelles conclusions tirer de ces deux anecdotes, puisées de la vie quotidienne, ces grands et petits soucis qui sont le lot journalier de toutes les villes dans le monde? Que notre pays, l'Algérie, oui, quoi qu'on en dise, «fonctionne» ! Tant bien que mal, peut-être, mais elle «FONCTIONNE» ! Dans une époque «dangereuse» qui a vu s'écrouler des nations réputées solides, que l'Algérie «tienne», reste debout, résiste, même difficilement, est un grand réconfort pour tous les patriotes épris de leur pays et qui ne veulent pas que leurs enfants se jettent dans la mer, sur des radeaux de fortune, pour aller chercher, ailleurs, secours et refuge.

Car, à bien y réfléchir, et lorsqu'on voit ce qui se passe parfois dans des contrées du même pédigrée que la nôtre, que nos médicaments nous soient encore livrés gratuitement, que nos trains, s'ils n'arrivent peut-être pas toujours à l'heure, finissent quand même par arriver, que nos enfants aillent étudier, chaque matin, à leur école, est presque un événement en soi (si on exagère un peu). Ce sont des maillons élémentaires de notre vie quotidienne, dont chacun de nous bénéficie et qu'on croit évident de pouvoir conserver, mais qui peuvent, malheureusement, être remis en cause, en cas de faillite, qu'à Dieu ne plaise, de la maison Algérie.

Bien sûr, tout n'est pas parfait chez nous, loin s'en faut, sinon on l'aurait vérifié dans notre vie de tous les jours. Cependant, nul n'a prétendu que notre pays était la Suisse ni que nous étions, nous les Algériens, des citoyens modèles, des saints et des futurs prix Nobel.

Les erreurs que nous avons commises- Dieu nous pardonne!- elles ont été nombreuses. Les fautes que nous avons perpétrées contre la probité, la sagesse, l'intelligence- Dieu nous pardonne!- il y en a eu beaucoup. Mais faut-il pour autant renoncer à espérer, à croire en nos capacités, à avoir la foi en l'avenir, en la possibilité d'une Algérie où il ferait bon vivre pour les générations futures?

La route qui mènera au salut sera semée d'embûches et pavée de larmes, il faut le répéter, pour que nous en prenions bien conscience. Pour grandir, il n y'a pas de recette miracle. Un pays est comme un enfant, il exige des sacrifices, beaucoup d'efforts, beaucoup d'amour, des valeurs à offrir en partage, une ambition commune à cultiver.

«L'Algérie est un sujet qui fatigue qu'il faut éviter de proposer au baccalauréat» nous disait un ami enseignant. Mais pour un Algérien, c'est le plus beau des sujets. Ne nous dupons pas, néanmoins: même à la veille de la fin du monde, certains compatriotes n'abandonneront pas leurs magouilles habituelles. Ils continueront à trafiquer et à se dire que «l'Algérie, c'est la jungle au carré» et que «s'ils ont volé des milliards, nous avons le droit de voler des millions». Ils continueront à maudire et à dépouiller leur pays et à ricaner sur nos bons sentiments. Ce n'est pas à eux que nous nous adressons ici.