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L'affront de plus

par Mahdi Boukhalfa

Aucune condamnation des bombardements d'une coalition de trois pays membres de l'OTAN contre la Syrie et une nouvelle mise en garde contre l'Iran sont les principaux faits à relever du dernier sommet arabe qui s'est tenu dimanche dans une ville de l'intérieur de l'Arabie saoudite. Sous la présidence des Saoudiens, le sommet s'est terminé comme prévu, avec des mises en garde sévères contre Téhéran, accusée par les monarchies du Golfe, notamment Ryadh, d'adopter une «politique agressive»dans la région.

Un des cauchemars des Saoudiens, l'Iran a donc constitué le parfait bouc émissaire pour les dirigeants arabes qui ont signé la déclaration finale de ce sommet, confirmant non seulement que dorénavant c'est bien l'Arabie saoudite qui télécommande toutes les décisions de la Ligue arabe, mais qui place ses rivalités régionales au cœur des actions de la Ligue. Sans surprise, le roi Salmane avait ainsi condamné la politique iranienne dans la région, qualifiant d'agressive l'attitude de l'Iran, avant de l'accuser de terrorisme et d'ingérences flagrantes dans les affaires des pays arabes. Une posture de la politique étrangère de Ryadh que l'on retrouve, sans grande surprise également, dans le contenu du communiqué final du sommet de ce dimanche.

Il ne fait aucun doute que la Ligue arabe est depuis quelques années, sinon depuis longtemps, une coquille vide ne servant plus la cause des pays arabes mais celle de certains pays arabes. Si l'Algérie a déçu ses soutiens et les observateurs politiques après avoir «déploré» les bombardements de la Syrie par la France, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne sous le même prétexte que celui qui a été avancé pour détruire l'Irak, les autres pays arabes ont dans leur majorité soutenu ce «casus belli»dans la plus flagrante illégalité internationale. Non, les pays arabes ne vont pas retrouver leur dignité avant longtemps. Mettre noir sur blanc dans un communiqué de ce sommet que l'Arabie saoudite rejette la décision US de reconnaître Al Qods comme capitale d'un Etat terroriste n'est que de la poudre aux yeux et n'est qu'un artifice politique de plus pour tenter de tromper surtout la rue arabe. Que vaut cette position vis-à-vis de la décision de Trump quand le fils du roi d'Arabie saoudite et héritier du trône claironne sur tous les toits que l'entité sioniste a elle aussi le droit d'avoir un Etat.

Jamais la Ligue arabe n'a paru aussi divisée, aussi faible, aussi absente de la scène internationale, mais également aussi malléable par l'un des pays qui va irrémédiablement agrandir les profondes lézardes apparues dans un édifice instable. D'autant que si les bombardements contre la Syrie, menés à la veille du déplacement d'une équipe d'experts de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) pour enquêter sur le pseudo-''gazage»au chlore de populations de la Ghouta, n'ont pas ému dans les travées du sommet arabe, la guerre injuste menée contre le Yémen par une coalition de pays arabes dont le Maroc, sous le commandement saoudien, a été évacuée de l'ordre du jour de ce sommet. Alors, une fois de plus, à quoi sert cette Ligue arabe si ce n'est de diviser ses Etats membres ? N'est-il pas temps pour l'Algérie de geler sa présence au sein d'un ensemble de pays qui n'a plus aucune influence ni intérêt, même pour les peuples arabes ?