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Poutine, merkel et la démocratie

par M'hammedi Bouzina Med

Vladimir Poutine élu pour un 4ème mandat: une arête dans la gorge des occidentaux. Pourquoi tant de mépris alors qu'Angela Merkel est félicitée, elle, pour son 4ème mandat ?

Oui, en Occident, tout le monde a compris que Vladimir Poutine et Angela Merkel sont à égalité du nombre de mandats à la tête de leurs pays respectifs. Mais, toujours en Occident, tout le monde accuse Vladimir Poutine d'avoir «volé» son 4ème mandat et félicité Angela Merkel d'avoir «mérité» sa 4ème victoire électorale. La démocratie est elle aussi, dit-on souvent, à géométrie variable. C'est que les occidentaux, USA et Europe, croient en une seule définition de la démocratie, la leur évidemment, et jugent le reste des pays à l'aune de leurs propres réalités politiques. S'il n'est pas question de ne pas reconnaitre le caractère libre et démocratique des élections en Occident, cela ne l'exonère pas de défauts et critiques souvent semblables, sinon pire que ceux qui polluent les systèmes dit «non démocratiques». Les exemples sont nombreux comme celui qui revient à l'actualité avec l'ex-président Nicolas Sarkozy en France, autoproclamée championne du monde de la démocratie, auditionné par le juges pour les « saletés» qui ont concouru à son élection de 2007. Et l'on sait combien Nicolas Sarkozy a aidé à un système démocratique en Libye, comme son successeur François Hollande en Syrie ! Il est quand même surprenant que les occidentaux, américains et européens chantres des libertés et de la démocratie bombardent, tuent, occupent des pays aux Proche et Moyen-Orient, en Afrique, boycott et asphyxient d'autres pays par des sanctions économiques, dénoncent la répression en Afrique et se taisent sur Israël en Palestine, tout cela au nom de la liberté et la démocratie. Encore plus hallucinant, les occidentaux accusent la Russie de Poutine de s'ingérer dans la guerre en Syrie, oubliant au passage que ce sont eux, les occidentaux, qui sont allés en premier bombarder ce pays, comme ils l'ont fait en Irak, en Libye...Pour faire chuter Bashar El Assad ils sont allés jusqu'à armer et soutenir des phalanges de terroristes qu'ils dénoncent ailleurs. Et puis ce monstre de Daech survenu soudainement avec une armée, une banque, des puits de pétrole...

L'Europe et les Usa reprochent à Poutine sa ferme volonté de défendre son pays et sa sphère d'influence. Ils ont encerclé la Russie en Ukraine, en Géorgie, en Syrie et même en Corée du nord et lui reproche de réagir et de prévenir son pays d'un étouffement géostratégique à ses frontières. Idem pour les fronts de défense balistique: les Usa ont installé chez leurs alliés européens, aux frontières russes un «bouclier» de radars et systèmes antimissiles et refusent le droit aux russes de redéployer leur arsenal de défense antimissiles -nucléaires- pour sécuriser leur territoire. Avec la chute du mur de Berlin en novembre 1989 et l'effondrement de l'ex-URSS, les peuples du monde ont cru à un début de détente de la guerre froide et le début d'une «dénucléarisation» de l'arsenal militaire. Enfin une ère de paix s'amorçait dans la joie de la liberté pour tous. Il fallait compter sans les énormes appétits d'intérêts économiques et géostratégiques des «démocraties» occidentales. Face à une Russie en ruine sous l'ère de Boris Eltsine ( 1991-1999) les occidentaux se sont rués aux frontières russes, ont enrôlé les anciens alliés européens de Moscou au sein de l'Union européenne et dans l'Otan, alors que la Russie a dissout le Pacte de Varsovie ( vis-à vis de l'Otan).

L'arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir va bouleverser les calculs des occidentaux et c'est tout naturellement qu'ils « n'apprécient» pas, le moins que l'on puisse dire, sa durée à la tête de son pays. Il leur tient tête et a redonné à la Russie sa fierté de grande puissance d'antan. Quoi de plus naturel alors d'attaquer Vladimir Poutine chez lui en stigmatisant et en dénonçant le système politique et électoral russe qui lui permetent de gagner un 4ème mandat? Ce n'est pas le cas en Allemagne pour Merkel disent-ils. L'Allemagne est une démocratie et pas la Russie. Selon les occidentaux, la Russie ne pourra être démocratique que si elle se débarrasse de Vladimir Poutine et son équipe, libéralise totalement son économie, intègre le marché mondial sans conditions, abandonne ses sphères d'influence immédiates comme l'Ukraine, la Géorgie, la Syrie etc. Enfin, que la Russie se place sous la coupe des occidentaux et obéisse à leur logique politique et géostratégique, bombarde à leurs côtés là où ils estiment la «démocratie» menacée. Dans leur offensive tous azimuts antirusse, les occidentaux oublient un paramètre capital: l'âme russe et l'histoire séculaire de ce pays construit autant par des tsars que des comités révolutionnaires et populaires. Ils oublient l'immense richesse culturelle et les épopées de son peuple. Ils oublient que c'est le pays de Léon Tolstoï, de Fiodor Dostoïevski, Pouchkine, Tourgueniev, Gorki, Soljenitsyne, Nabokov... C'est à dire un pays avec une mémoire aussi lointaine et dense que celle des européens, une identité hérité d'une longue histoire, une personnalité et un orgueil si particuliers qu'il lui évitent toute soumission ou allégeance à cet occident si prétentieux, si sûr de lui et des ses conceptions de la politique et de la démocratie, si envahissant et si violent envers les autres. Les russes et Vladimir Poutine savent combien leur coûtera en violence et misère s'ils baissent la garde face aux Américains et aux Européens. Ils ont eu leur part en attentats terroristes, en ruine de secteurs économiques stratégiques, en fossé entre riches et pauvres, en scandales de corruption, en émergence de clans mafieux , en isolement etc. Leur pays a été au bord de la ruine sous l'ère Eltsine, moqué pour ses pitreries publiques sous l'effet de la vodka. Vladimir Poutine a redressé et sauver son pays de la ruine. Il lui a redonné ses lettres de noblesse et su le faire respecter. Pourquoi les Occidentaux refusent-ils à la majorité du peuple russe de réélire son champion? Oui, il y eut des irrégularités mais à l'évidence il aurait gagner l'élection sans ces irrégularité marginales de quelques zélés du pouvoir. Pourquoi ce qui est valable pour Mme Angela Merkel, et elle le mérite, n'est pas valable pour Vladimir Poutine? Dans leur délire, les Américains accuse Vladimir Poutine d'avoir décidé de l'élection de Donald Trump. C'est à dire avoir dicté le choix des Américains. S'il n'est pas exclu que les services russes se sont immiscés dans les élections américaines, il est grotesque de faire croire qu'ils ont «voté» à la place du peuple et du 1er collège des sénateurs américains. Du reste, les Occidentaux affichent ouvertement leur soutien à l'opposition politique russe et financent de nombreuses associations hostiles à Vladimir Poutine et estiment cela normal.

Dans les guerres souterraines entre services secrets à l'échelle mondiale, il n'y pas des vertueux d'une part et de barbouzes de l'autre. Chacun défend les intérêts de son pays et c'est valable autant pour les Occidentaux que pour les Russes ou le reste des pays du monde. La démocratie est indissoluble de sa matrice de justice et de liberté. Lorsque elle devient prétexte à la domination, à l'exclusion et malheureusement à la violence et la guerre, elle ne diffère en rien des dictatures. Le monde des dominés assiste impuissant aux coups de boutoirs et autres subversions déstabilisatrices du peu de ce qu'il possède comme paix et stabilité politique au nom de la démocratie du monde des dominants. Ces pays occidentaux qui continuent de flatter le monde arabe et maghrébin de «leur printemps» alors que la Libye est explosée, le Yémen meurtri dans le silence, la Syrie martyrisée quotidiennement et leurs enfants errant sur les routes meurtrières de l'exil. Nous entrons dans le 21ème siècle avec un capital de technologie et d ?échanges intenses de la connaissance et des faits de l'actualité mondiale qui aiguisent de plus en plus la conscience des peuples et leur perception du réel qu'il vivent. Les peuples voient et savent les injustices et les violences qui frappent les plus faibles et sont révoltés. Les slogans répétés au nom de la démocratie et de la liberté par les occidentaux ne suffisent plus à cacher les mensonges et la réalité des guerres injustes au nom des «intérêts» économiques et stratégiques. Alors que Poutine et Merkel aient décroché un 4ème mandat tant mieux pour eux et leurs peuples. Quant aux occidentaux , gare au montée des extrêmes qui se nourrissent des scories qui rongent la démocratie chez eux.