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L'excès de non conventionalité de l'économie risque d'agiter la société

par Reghis Rabah*

Après un mois de débat houleux dans cette aventure de financement non conventionnel durant laquelle le premier ministre a complètement dérouté la société : Il a dressé un tableau sombre de la situation du trésor public jusqu'à menacer les salaires des fonctionnaires y compris les députés. Son ministre des fiances, en présentant le projet de l'amendement de la loi sur la monnaie et le crédit a en quelque sorte remis les pendules à l'heure : Il n'est plus question selon lui de payer les fonctionnaires avec les billets ainsi imprimés mais ils serviront uniquement à débloquer les projets et les chantiers à l'arrêt. Il n'y a pour le moment aucun montant officiellement avancé mais celui annoncé par les uns et les autres semble donner le vertige. Mais la pilule a pu passer. Maintenant, est-ce vraiment le moment opportun pour sortir encore une fois le dossier du gaz de schiste qui a fait couler tant d'encre il n'y a pas si longtemps et que la population du sud croyait définitivement clos sur instruction du président de la république en personne. La pagaille et la cacophonie qui vont suivre vont-elles régler le déficit budgétaire qui est pour le moment le problème N°01 du gouvernement. A quoi bon donc mettre sur la table du débat des sujets qui fâchent lorsqu'ils n'ont aucun effet sur le court, le moyen et spécialement le très long terme pour cette ressource non conventionnelle. Il faut signaler par ailleurs que pour le moment, les investisseurs ne fuient pas le code pétrolier d'un pays et l'Algérie ne fait exception, mais les prix du baril bas les dissuadent. C'est une situation qui n'est pas propre à l'Algérie mais touche le monde pétrolier et gazier. Pour le cas spécifique de l'Algérie si les appels d'offre restent infructueux, ce n'est certainement pas la faute du code pétrolier ni dans sa partie juridique et encore moins dans sa fiscalité. Le problème réside dans l'absence d'une stratégie énergétique de l'Algérie. Les différents amendements apportés aux diverses lois pétrolières depuis l'abolition du Code Pétrolier Saharien (CPS) de 1958 n'ont fait que tripoter les textes au gré des circonstances mais ne visaient aucun objectif stratégique. La preuve, le premier responsable du secteur de l'énergie a emboité le pas à son premier ministre pour tenter de justifier les amendements prévus pour la loi de 2013 par la baisse du prix du baril. On ne peut plus soutient-il appliquer une réglementation d'un prix de 150 $ à celle qui se situe à 50$. Or, lorsque les prix frôlaient les 160 $ le baril, la loi de 1986 n'avait pas prévu un tel scenario pour obliger les pouvoirs publics à instaurer une Taxe sur les Profits Exceptionnels (TPE) qui les a mené droit à un conflit avec ses partenaires pour perdre rien que ce qui est notoirement connu prés 5,9 milliards avec Anadarko. La pression faite par Total pour suivre le chemin de sa consœur américaine a contraint Sonatrach de lui faire plusieurs concessions prioritaires sur injonction politique. Les dirigeants des entreprises, notamment françaises ont compris depuis la mort de Boumediene que le management de Sonatrach n'est qu'une équipe de super- secrétaires qui obéissent aux ordres des politiques. Pour cela, durant l'année 2015-2017, les responsables français ont fait plus de visites en Algérie que dans leurs propres métropoles sans compter les supers conciliateurs comme les Jean Pierre Raffarin et Chevènement. A partir donc d'un diagnostic erroné, on aboutira forcement à un amendement de même nature. Quels sont les acteurs, partie prenante dans un code pétrolier ? Quels en sont leur objectifs ?

Des acteurs et leurs objectifs

Il ya d'abord les pays producteurs représentés pour la plupart par leurs compagnies nationales dites dans le jargon pétroliers NOC (National Oïl Compagnie) leurs objectifs principaux tournent autour de la valorisation de leurs ressources naturelles, ensuite tirer des fruits de la rente par la vente des hydrocarbures et surtout utiliser tout cela pour assurer le développement durable de leurs pays. Il faut signaler par ailleurs que la majorité des pays producteurs y compris les plus pauvres comme le Nigeria en passant par les pays du Golf ont compris qu'ils doivent suivre ces objectifs par d'une part penser à la diversification de leurs économies et d'autres part s'approcher d'un mode de gouvernance d'une vraie économie réelle. L'Algérie et le Venezuela continuent de dévier de cette ligne pour faire de l'accalmie sociale leur principale cible d'où le gaspillage et la débâcle périodique à chaque fois que le prix du baril baisse.

Pourquoi évoquer aujourd'hui l'exploitation du gaz de schiste en Algérie est tordant

L'Algérie dispose d'un domaine minier formé de roche sédimentaires susceptibles de renfermer des pièges pétroliers et gaziers et qui s'étend sur plus 1,6 millions de km² dont à peine 4% soit environ 64 000 km² en exploitation. Le reste est prospecté à hauteur de 64% de la bouche même de l'ancien ministre de l'énergie dans une communication au conseil des ministres en décembre 2015. Si on fait les calculs, on aura à quelque km prés 751 754 km² de terrain libre pour explorer voire, parfois exploiter les pièges conventionnels dans lesquels Sonatrach devrait avoir une certaine expertise et savoir faire d'un demi siècle. L'amendement de la loi des hydrocarbures de 2013 a permis l'exploration et l'exploration du gaz de schiste mais tous les appels d'offre préparés par Alnaft ont été infructueux. Pourquoi ? Pour une simple raison que son exploration et exploitation au prix du baril actuel est non rentable parce qu'elle ne permet pas de rémunérer une mise risquée consentie par l'investisseur dont l'objectif est d'abord financier. Le troisième acteur qu'une loi pétrolière doit prendre en considération c'est les sociétés parapétrolières dont l'objectif est le développement des expertises pétrolières pour uniquement faire du profit. Le mode d'extraction du gaz de schiste et du pétrole est leur dada. Les Etats Unis a évalué le potentiel en gaz de schiste à prés de 20 000 milliards de m 3 ,c'est plus 240 ans au rythme actuel de production en Algérie. Sonatrach l'a t- elle confirmé ? Pas encore mais de nombreuses sociétés parapétrolières comme des filiales de Total, Schlumberger et Haliburton qui excellent dans ce domaine l'incite à le faire pour se targuer un plan de charge et pomper les devises pour un résultat connu d'avance. Des rumeurs persistantes de l'intérieur comme de l'extérieur à commencer par le quotidien « le monde » laissent entendre que si effectivement les puits de cette ressource non conventionnelle ont été fermés à In Salah, la recherche dans ce domaine n'a jamais céssé du côté de Reagan. Tout cela pour dire qu'on n'est pas sorti de l'auberge.

*Consultant et Economiste Pétrolier